Fiche de lecture « No Filter : the Inside Story of Instagram »

« No Filter : the Inside Story of Instagram » de Sarah Firer raconte un récit intime l’aventure de la plateforme, de sa conception à l’essor mondial qu’on lui connaît aujourd’hui, en passant par l’acquisition de Mark Zuckerberg avec Facebook avec ses rebondissements, les liens profonds avec Jack Dorsay de Twitter, et les rebondissements avec les stories Snapchat de Evan Spiegel.

Les débuts d’Instagram

Un pur produit de la Silicon Valley

Né en 1987, Kevin Systrom est décrit entre les deux univers. Capitaine de l’équipe de lacrosse au lycée et animal social, il est aussi passionné de technologie et développe des applications web. Étudiant à Stanford, Systrom y fait la rencontre de Mark Zuckerberg dès 2005. Ce dernier cherche à le recruter pour intégrer les photos sur TheFacebook alors que la plateforme s’étant au-delà des universités. Systrom refusera afin de se concentrer sur ses études. Il commence un stage à Odeo où il y rencontrera Jack Dorsay, futur CEO de Twitter qui deviendra son mentor.

À la fin de ses études à Stanford, Kevin Systrom travaillera à Google en tant que product manager. Vite lassé de la culture de l’optimisation par la data qui règne à Google, il se dirigera vers un travail lui permettant de travailler sur ses projets annexes.

En 2007, San Francisco est en pleine effervescence du marché de l’app economy. Au fils des soirées et week-ends passés dans des cafés à travailler sur un projet, Systrom développe l’ancêtre d’Instagram : Burbn.

C’était une application qui permettait aux utilisateurs de référencer les endroits tendances de San Francisco en publiant des photos et en gagnant des prix virtuels à mesure qu’ils utilisent l’application. Systrom cherche alors à financer son application et se met en quête de Venture Capitalist. C’est alors qu’il rencontre Steve Anderson qui lui propose de financer Burbn à condition qu’il trouve un co-fondateur. Systrom s’allie donc avec Mike Krieger avec lequel il formera un duo jusqu’à leur départ d’Instagram en 2018.

L’esthétique de l’image au cœur d’Instagram

Systrom et Krieger réalisent que bien que répondant aux mots clés de la Silcon Valley de l’époque — mobile, social, géolocalisation — Burbn ne répond pas à un besoin à part être amusant et n’améliore pas le quotidien des utilisateurs. C’est alors qu’ils décident de se concentrer sur la photo. L’arrivée des smartphones donne la possibilité à n’importe qui de devenir un photographe amateur.

Les filtres natifs à la plateforme deviendront le piller du succès d’Instagram. Ils offrent les possibilités aux utilisateurs d’embellir leurs photos et les poster sur tous leurs réseaux dont Twitter. L’intérêt est double car cela permet d’attirer de nouveaux utilisateurs sur Instagram juste pour les retouches.

Construire le succès d'Instagram

L'expansion d'Instagram

À son lancement le 6 octobre 2010, la croissance d’Instagram est exponentielle en grande partie par des ambassadeurs d’élite dont faisait partie Jack Dorsay. Fervent utilisateur d’Instagram, a chaque photo qu’il postait sur Instagram, il faisait un tweet qui touchait sa communauté Twitter de 1,6 million d’abonnés. Résultat : 25,000 nouveaux utilisateurs le premier jour. En une semaine, ils étaient 100,000. Fin décembre 2010, le cap du million d’utilisateurs est passé. Mi-février, ce sont 2 millions d’utilisateurs.

Le contraste est flagrant entre le succès de l’application et l’équipe derrière Instagram. Jusqu’ici, Systorm et Krieger seuls aux commandes, se mettent en recherche de nouveaux pour gérer les problématiques de cette expansion rapide. Deux nouvelles recrues font leur apparition : Shayne Sweeny pour gérer l’infrastructure de l’application, Joshua Riedel comme community manager. Ce dernier a été rejoint quelques mois plus tard par Jessica Zollman notamment sur des sujets de modération de contenu

Construire la communauté d’Instagram

Frier note que la communauté d’Instagram est le point central du succès de l’application. Systorm et Krieger ont sélectionné les premiers utilisateurs d’Instagram avec soin, basé sur leur talent artistique, de photo ou de design, mais aussi en fonction de leur base d’abonnés sur Twitter. L’équipe a ensuite commencé à organiser des InstaMeet pour faire se rencontrer les utilisateurs influant et créer des ambassadeurs. 

Puis les marques comme Pepsi et Starbucks, et les célébrités sont arrivées sur la plateforme. Des célébrités comme les sœurs Kardashian-Jenner, Taylor Swift se sont mises à utiliser le réseau. Le premier, comme avec beaucoup de nouvelles technologies, était Snopp Dog. Un exemple intéressant est Justin Bieber, qui a son arrivé sur Instagram à emmener toute sa fan base. Son agent est donc venu négocier avec Systrom pour que Bieber se fasse rémunérer pour son contenu par Instagram, ce que Systrom a refusé. Bieber est alors parti d’Instagram, mais sa petite amie Selena Gomez publiait des photos de leur quotidien pour le plaisir de leur fan. Bieber s’est donc retrouvé à venir gracieusement sur Instagram. Moins d’un an après le lancement d’Instagram, la plateforme comptait 10 millions d’utilisateurs

Au début, Instagram n’avait pas d’algorithme donc pas de moyen pour une publication de devenir virale. Aussi, l’équipe choisissait quel contenu était mis en valeur via le blog d’Instagram. Les deux premières fonctionnalités ont été ajoutées pour le potentiel de viralité sur la plateforme : le re-share qui crédite le créateur d’orgine et une shortlist d’utilisateur à suivre en arrivant sur Instagram.

Le rachat de Facebook

Article du Monde à l'annonce du rachat d'Instagram

Le contexte de l’acquisition d’Instagram

L’acquisition d’Instagram en 2012 est historique. D’abord par le montant versé par Zuckerberg : 1 milliard de dollars, soit 1 % de la valorisation boursière de Facebook avant d’entrer en bourse l’année suivante. Au-delà du volume de la couverture médiatique, Frier raconte les dessous de cette acquisition dans son livre. Instagram venait de finir une nouvelle vague d’investissement. En effet, Systrom a depuis le début d’Instagram courtisé avec succès les investisseurs pour financer Instagram, sans pour autant que la plateforme ne fasse de profits. Début 2012, Twitter a commencé les négociations avec Systorm pour un éventuel rachat d’Instagram. Systorm n’avait pas l’intention de vendre, car, au-delà de l’aspect financier, l’indépendance créative était au cœur de sa vision long terme de la plateforme. 

Indépendance créative d’Instagram avec Facebook ?

C’est l’argument gagnant que Zuckerberg a joué pour convaincre Systorm de vendre à Facebook. En effet, là où Twitter se concentrait sur le business, Zuckerberg a lui misé sur une négociation de fondateur à fondateur. Au lieu d’avoir à copier les fonctionnalités d’Instagram, Zuckerberg pourrait faire bénéficier l’expansion de la plateforme des ressources existantes de Facebook tout en maintenant l’indépendance de la plateforme. 

Copier ou acheter, la loi des réseaux sociaux

La motivation du fondateur de Facebook était quant à elle ancrée dans la paranoïa de Zuckerberg que nous connaissons aujourd’hui dans sa stratégie. « Si nous ne créons pas ce qui tuera Facebook, quelqu’un d’autre le fera. Internet n’est pas un endroit amical. Les choses qui ne restent pas pertinentes n’ont même pas le luxe de partir en ruine. Elles disparaissent » écrit Zuckerberg dans le document d’intégration des nouveaux employés de Facebook.

Sarah Frier est une journaliste et écrivaine spécialisée dans le secteur technologique et dans l’innovation pour le média américain Bloomberg News. Elle a construit sa carrière journalistique dans l’étude de la croissance des réseaux sociaux : Instagram, Facebook, Twitter et Snapchat