La digitalisation du secteur de la seconde main

Vêtements seconde main par Pexels

Aujourd’hui j’aimerais vous parler des effets négatifs de la digitalisation du secteur de la seconde main et notamment de celui des vêtements. C’est un marché qui est en expansion depuis plusieurs années maintenant, notamment grâce au digital. 

Selon l’infographie de Jeanne Nahmias sur l’essor du marché de l’occasion, on apprend que 80 % des cyberacheteurs ont déjà acheté des produits reconditionnés ou de seconde main en ligne d’après l’étude de KPMG et FAVD en 2023.

On sait aussi que 74 % des cyberacheteurs déclarent vérifier systématiquement si le produit qui les intéresse est également disponible en seconde main. Ces chiffres montrent bien que le marché de la seconde main a connu un essor grâce au digital. Cependant dans une ère où la sensibilisation environnementale atteint des sommets sans précédent, la conscience collective s’éveille à l’impact dévastateur de la surconsommation sur notre planète. 

Seconde main générée par Craiyon

Le marché de la seconde main : une transformation positive ou  négative ?

Dans cette quête de durabilité, le marché de la seconde main a émergé comme une alternative prometteuse, offrant la possibilité de prolonger la durée de vie des produits et de réduire ainsi les déchets. Pourtant, alors que la demande pour les articles d’occasion prospère dans le monde physique, une question persiste : est-ce que cette tendance est compatible avec le monde numérique et ses effets environnementaux

L’essor fulgurant du commerce en ligne et des plateformes digitales de seconde main soulève des préoccupations quant à leur propre empreinte carbone et leur contribution à la pollution numérique. 

Nous allons voir pourquoi le marché de la seconde main devrait être à priori incompatible avec le digital et comment remédier à cela. 

Au premier abord on sait que le marché de la seconde main est une initiative noble et bonne pour la planète cependant derrière la digitalisation de cette pratique, on observe un côté plus “dark” de cette seconde main en ligne. 

La revente d’occasion pour acheter neuf 

En revanche, le marché de la seconde main continue de soutenir celui de la première main, offrant ainsi un soutien durable aux grandes enseignes. Une étude réalisée par le cabinet Boston Consulting Group pour le site internet Vestiaire Collective révèle que 70% des utilisateurs voient la revente en seconde main comme un moyen d’augmenter leur pouvoir d’achat sur le marché de la première main. 

Une tendance similaire est observée du côté de The RealReal, un site américain incontournable de luxe de seconde main, où la majorité des vendeurs utilisent leurs gains pour acheter des articles de première main. C’est ainsi que le consommateur, une fois l’article revendu en ligne, retourne en magasin pour se procurer les dernières collections.

Sous le prétexte de la conscience écologique, la seconde main en ligne offre surtout une opportunité de compléter ses revenus et de réaliser de bonnes affaires, sans sacrifier son budget. Cela se reflète dans le prix moyen par article de 15 euros sur Vinted, et dans le fait que 71% des acheteurs de Vestiaire Collective déclarent ne pas pouvoir se permettre ces marques en première main.

Impact négatif du marché de la seconde main

La digitalisation du marché de la seconde main : un réel impact environnemental 

Les serveurs informatiques, qui stockent les données de ces sites web, fonctionnent en continu et consomment énormément d’électricité, principalement issue de centrales à charbon. Cette consommation électrique est attribuée aux diverses activités des serveurs, notamment le traitement des informations, le refroidissement des serveurs et les générateurs de secours.

On estime qu’il existe environ 67 millions de serveurs répartis dans 5000 à 8000 centres de données, chacun nécessitant autant d’électricité qu’une ville de 30 000 à 50 000 habitants. Cette consommation d’énergie connaît une croissance exponentielle chaque année, en raison de l’augmentation du nombre de sites web de plus en plus gourmands en énergie.

 

 

 

La livraison des articles est organisée par les maisons mères auprès de transporteurs internationaux, couvrant des distances de plus en plus importantes, telles que des Pays-Bas à l’Espagne pour Vinted et de la France aux États-Unis pour Vestiaire Collective. 

En Europe, 88% des livraisons se font par camion, ce qui contribue à la détérioration des routes. Un camion de 40 tonnes pollue autant que 60 000 voitures, et l’augmentation du trafic de camions entraîne une pression supplémentaire sur les chauffeurs, provoquant ainsi de graves accidents. 

Marché de la seconde main

Les effets négatifs de la digitalisation du secteur de la seconde main

En définitive, voici les effets négatifs de la digitalisation du secteur de la seconde main :  ce nouveau modèle de consommation emprunte les mêmes stratégies que la fast fashion, avec pour objectif commun une croissance exponentielle à l’échelle mondiale : réductions de prix, forte présence en ligne, promotion de la rareté, rotation fréquente des collections, assortiment pléthorique, processus d’achat fluide, facilité et rapidité, ainsi que la livraison des commandes sur de longues distances. 

Bien que l’allongement de la durée de vie des produits et leur accessibilité puissent être salués, le service dans son ensemble n’est pas conçu de manière holistique et circulaire. Ainsi, il reste encore beaucoup à faire pour réduire l’empreinte carbone de cette approche.

En conclusion, l’achat d’occasion présente un double visage. Il représente une alternative vertueuse, mais seulement si elle est intégrée dans une approche de sobriété. Autrement, son attractivité en termes de prix et le sentiment de déculpabilisation qu’il suscite peuvent conduire à oublier que les produits de seconde main ne sont pas exempts d’impact, tout comme une bouteille en plastique recyclable demeure du plastique.

Alors comment faire en 2024 pour digitaliser sa marque de vêtements de seconde main sans pour autant alimenter un système toujours aussi polluant qu’auparavant ? 

Quelles sont les bonnes pratiques à adopter pour consommer ou vendre de la seconde main ? 

1- Une régulation des prix

Avec la digitalisation du secteur de la seconde main, les plateformes comme Vinted par exemple devraient réguler les prix de vente. En effet on trouve encore certains articles vendus à des prix exubérants pour de la seconde main. La plateforme devient de plus en plus un moyen d’obtenir des produits issus de la fast fashion ou de première main à des prix bas, comme les soldes. Avec une régulation des prix sur certains produits/marques, le consommateur devra rester obligatoirement dans une démarche sincère pour un monde plus durable et responsable. 

2- Un changement de comportement face à notre consommation

Le consommateur doit aussi  changer sa façon de consommer (une fois de plus) car il nourrit encore, même sans le vouloir, le marché de la fast fashion. Pour cela il faut dans un premier temps favoriser le commerce équitable en achetant des produits locaux est aussi une bonne façon de participer à la transition écologique ainsi qu’à la juste rémunération des producteurs et artisans. 

 Malgré un contexte économique difficile, on peut se tourner vers le don plutôt que vers la vente, dans une démarche durable, solidaire et équitable. Par exemple, donner ses vêtements à Emmaüs. 

Marché de la seconde main

Pour conclure, le marché de la seconde main demeure largement bénéfique pour l’environnement et la société dans son ensemble. Il est essentiel de maintenir une approche de consommation réfléchie qui n’oublie pas l’importance des structures solidaires. Un défi majeur du réemploi réside dans la durabilité des produits. Ainsi, tout comme pour les achats neufs, privilégier les pièces intemporelles et de qualité tout en veillant à l’entretien des vêtements est crucial. L’achat d’occasion ne devrait jamais encourager la surconsommation ou les achats éphémères. Il est donc essentiel de fournir des informations et un accompagnement adéquats aux consommateurs afin que les solutions de prolongation de la durée de vie des produits soient accessibles à tous.

Je remercie tout de même Jeanne Nahmias pour son infographie pertinente qui m’a permise de rebondir sur les effets de la digitalisation du marché de la seconde main. 

Je vous invite également à lire cet article de Converteo sur l’impact du digital sur l’essor de la seconde main, qui vous permettra d’en apprendre plus sur le sujet !

0 commentaires

Laisser un commentaire