Publié en 2006, « La Longue Traîne » est un livre de Chris Anderson dans lequel il explore le concept de la « longue traîne », dans le contexte de l’économie numérique.
Selon lui, grâce à Internet et aux technologies numériques, les entreprises sont en capacité de proposer une large variété de produits de niche qui finissent par représenter une part significative des ventes totales, même si chacun des produits ne se vend qu’à faible intensité. Ce phénomène est illustré par une courbe de distribution s’étirant sur une longue traîne, le produits de niche représentant la queue de la distribution.
Cet ouvrage est devenu une référence pour les entreprises, dans le cadre de la conception de leurs modèles économiques en ligne. Il convient toutefois de nuancer ce concept, au regard de la question de la rentabilité à long terme.
Chris Anderson, auteur et entrepreneur passionné par l’univers du numérique
Dans les années 90
Né le 9 juillet 1961 à Londres, Chris Anderson est un entrepreneur et journaliste américain. Avant de se réorienter dans le monde du journalisme, il a d’abord travaillé au laboratoire national de Los Alamos. En effet, il se destinait avant tout à une carrière de physicien. Finalement, poussé par sa passion pour l’univers numérique et ses nouvelles technologies, il est devenu l’un des premiers à couvrir le monde d’Internet pour le magazine britannique The Economist. Il a notamment lancé le site internet de ce média en 1993.
Dans les années 2000
En 2001, il est devenu le rédacteur en chef du magazine américain Wired, consacré aux nouvelles technologies. Il en a profité pour fonder GeekDad, un blog qui a été intégré à Wired.com, et Booktour.com, un service gratuit en ligne permettant de mettre en contact des auteurs avec leur public.
En 2004, Chris Anderson a popularisé l’expression « long tail » (longue traîne), dans un article de Wired. Il a par la suite développé ce concept en 2006, dans son livre The Long Tail : Why the Future of Business is Selling Less of More.
Entrepreneuriat
Fort de son esprit d’entreprendre, il a fondé 3DRobotics, une entreprise spécialisée dans la fabrication de robots. En 2009, il a également créé la communauté en ligne DIY Drones, destinée aux amateurs de robotique aérienne.
Grâce à ses qualités d’entrepreneur, de journaliste et d’auteur de livres à succès, Chris Anderson est aujourd’hui reconnu à l’international. Il a même été classé en 2007 par le Time magazine, parmi les 100 penseurs les plus visionnaires.
Un concept étudié dans un contexte marqué par une expansion de l’économie digitale
L’ouvrage La Longue Traîne de Chris Anderson a été publié en 2006, dans un contexte marqué par l’expansion de l’économie numérique. À cette époque, les entreprises numériques commençaient à se populariser de manière significative. La question de la maximisation de leur potentiel économique représentait toutefois un enjeu de taille.
La plupart des entreprises en ligne mettaient l’accent sur la création de contenus grand public, qui avaient le plus de chance de connaître un succès massif, et qui généraient ainsi la majorité des revenus. Il s’agissait donc d’une approche de type « hit-driven », c’est-à-dire orientée vers les « tubes ».
Contrairement à cette approche, Chris Anderson a vu un potentiel inexploité dans la production et la distribution des produits de niche, qui étaient souvent ignorés par les grandes entreprises traditionnelles.
Selon cette nouvelle vision de l’économie numérique, les entreprises peuvent donc maximiser leur potentiel économique en exploitant la demande pour des produits de niche, à l’aide des technologies numériques.
Ce concept innovant formulé dans l’ouvrage « La Longue Traîne » a bien évidemment influencé de nombreuses entreprises et entrepreneurs dans les années suivantes.
Une vision de l’économie numérique basée sur l’utilisation des technologies digitales pour produire et distribuer des produits de niche
Ainsi, selon Chris Anderson, la « Longue Traîne » explore l’idée d’une économie numérique basée sur l’utilisation des technologies digitales pour la production et la distribution de produits de niche. Plusieurs points de l’ouvrage semblent étayer cette théorie.
Tout d’abord, Chris Anderson soutient que les technologies numériques ont rendu possible la production et la distribution de produits de niche à grande échelle, et que cette nouvelle forme de distribution économique peut être lucrative pour les entreprises qui l’adoptent. Il expose ici une nouvelle forme de distribution économique.
En second lieu, Chris Anderson décrit son concept de « Longue Traîne » comme une courbe de distribution, s’étendant sur une plus grande période que la courbe de distribution classique qui se concentre sur les produits les plus populaires. Ainsi, les produits de niche se vendent en petite quantité, mais le cumul de leurs ventes représente une part significative des revenus finaux.
De ces deux constats précédents naît l’idée que les entreprises devraient se concentrer sur les produits de niche. Selon Chris Anderson, les entreprises qui se concentrent sur les produits de niche peuvent générer des revenus significatifs en capitalisant sur la demande pour ces produits. Les entreprises en ligne devraient donc adopter des modèles économiques permettant de rentabiliser les produits de niche, plutôt que de se concentrer uniquement sur les produits les plus en vogue.
Pour rendre possible ce nouveau modèle économique, les technologies numériques doivent être utilisées, afin de faciliter la production et la distribution de ces produits de niche. En effet, Chris Anderson fait par exemple référence aux plateformes de distribution en ligne et aux outils de production numériques, qui permettent de produire et de distribuer à moindre coût.
Cette nouvelle vision de l’économie numérique, proposée par Chris Anderson, met donc l’accent sur la production et la distribution de produits de niche, en utilisant les technologies numériques pour atteindre une audience plus large.
La « longue traîne » selon Chris Anderson : une influence majeure pour de nombreuses entreprises
Les points forts de cette théorie
Tout d’abord, il a implémenté un changement de perspective dans l’industrie en encourageant les entreprises à se concentrer sur les produits de niche plutôt que de ne produire que des produits populaires. Les entreprises ont donc capitalisé sur la demande pour des produits spécifiques, en utilisant les technologies digitales pour atteindre des publics plus larges et rentabiliser ces produits.
Ensuite, l’ouvrage a proposé des modèles économiques innovants qui ont permis aux entreprises de rentabiliser ces produits spécifiques. Par exemple, la distribution en ligne permet de réduire les coûts de stockage et de distribution, rendant rentable la production de produits à faible volume de vente.
Enfin, l’ouvrage a eu un impact significatif sur l’industrie en montrant comment les entreprises peuvent tirer parti des données et des technologies numériques pour comprendre et atteindre leur public cible de manière plus efficace. Par exemple, des techniques telles que l’analyse de données ont permis aux entreprises d’identifier des niches de marché précises et d’adapter leur production et leur marketing en conséquences, améliorant leur rentabilité à long terme.
Exemple d’application de ce modèle économique par une entreprise
Netflix a commencé à offrir des services de streaming vidéo en se basant sur la production de contenus de niche, plutôt que sur des films et séries populaires. En produisant des séries originales telles que « Stranger Things » et « The Crown », Netflix a réussi à atteindre des publics de niche et à fidéliser des publics spécifiques, tout en continuant à produire des contenus plus populaires tels que « House of Cards » pour attirer des audiences plus larges. Cette stratégie a permis à la plateforme de construire un catalogue de contenus diversifié et attractif, contribuant à sa croissance et à sa domination sur le marché du streaming vidéo.
Un concept à nuancer : la question de la rentabilité à long terme
Plusieurs critiques peuvent être formulées
L’une des principales critiques de la longue traîne est que la saturation du marché peut entraîner une concurrence accrue, ce qui peut rendre difficile pour les entreprises de maintenir leur rentabilité à long terme. Si de nombreuses entreprises adoptent cette vision, cela peut conduire à une situation de forte concurrence, où les marges bénéficiaires sont faibles.
Une autre critique du concept de Chris Anderson est qu’il ne s’applique pas à toutes les industries. Certaines industries sont davantage orientées vers les produits de masse, tandis que d’autres se prêtent mieux aux produits de niche.
En outre, certains ont souligné que la longue traîne peut être difficile à mettre en oeuvre pour les petites entreprises qui n’ont pas les ressources nécessaire pour produire des produits de niche à grande échelle.
Enfin, il convient également de noter que les entreprises traditionnelles ont également la capacité de produire des produits de niche, ce qui peut limiter l’avantage compétitif des entreprises en ligne qui utilisent cette stratégie.
Quelques ouvrages à mettre en perspective
Cet ouvrage doit donc être nuancé en tenant compte à la fois de ses contributions et de ses limites.
Plusieurs ouvrages peuvent être mis en perspectives avec La Longue Traîne de Chris Anderson, pour le situer dans un contexte plus large de l’économie numérique, en fournissant des perspectives supplémentaires sur les stratégies pour lancer une entreprise, innover et s’adapter à un marché en constante évolution.
On peut par exemple citer « The Innovator’s Dilemma » de Clayton Christensen, publié en 1997, soit 9 ans avant « La Longue Traîne », qui traite de la manière dont les entreprises établies peuvent être confrontées à des défis lorsque de nouveaux acteurs perturbent leur marché. Il propose des stratégies pour que les entreprises puissent s’adapter à ces changements et innover.
On peut également mettre « La Longue Traîne » en perspective avec « The Lean Startup » d’Eric Ries, publié en 2011. Il propose une méthode pour les entrepreneurs qui souhaitent lancer une entreprise en minimisant les risques. Il encourage les entrepreneurs à adopter une approche « lean » (maigre) en se concentrant sur la production de produits minimum viables, en obtenant des commentaires de clients et en itérant rapidement.
Pour consulter les autres fiches de lecture de cet ouvrage, rendez-vous ici :
– https://blog.mbadmb.com/la-longue-traine-de-chris-anderson/