La clean beauty : 50 ans d’histoire

La clean beauty : 50 ans d’histoire 

Depuis plusieurs années les produits cosmétiques naturels gagnent des parts de marché. Les produits cosmétiques présentant des allégations naturelles et bio représentent aujourd’hui 14% du marché. Les lancements de marques clean se multiplient. Avant d’en arriver là, nous sommes passés par des mouvements sociétaux de fond et des crises amplificatrices. Cependant il faut rappeler qu’avant de devenir un mouvement quasi planétaire, le terme Clean Beauty nous vient de l’autre côté de l’océan Pacifique.

Comment la clean beauty est-elle née en France ?

Années 70 : Première régulation du marché cosmétique en France & Europe

 

Les premiers cosmétiques naturels ont été mis au point en Allemagne dans les années 1920. Ils n’arriveront dans l’hexagone qu’à partir des années 1970. C’est à cette époque qu’apparaissent les premières marques naturelles en France telles que Phyt’s (1972) ou encore Paltz (1976). Cependant, pendant de nombreuses années, la cosmétique bio n’intéresse pas les circuits mass market. D’une part car ces produits ne bénéficient d’aucune labellisation à l’époque mais aussi car ils sont perçus comme peu attrayants en termes de textures, de parfums ou de packaging.

A cette même période, l’Europe et la France se dotent de la réglementation cosmétique la plus stricte au monde. L’Affaire tragique du talc Morhange a poussé les autorités à encadrer le marché des cosmétiques. En 1972, une erreur de manipulation a entraîné une surdose d’un bactéricide dans un talc destiné aux bébés (le talc Morhange) causant ainsi la mort de 36 nourrissons et l’intoxication de 168 autres. C’est dans ce cadre qu’en 1975, la ministre de la Santé Simone Veille, fait voter la loi qui porte son nom, destinée à encadrer les cosmétiques. La loi française sera suivie en 1978 d’une directive européenne. Elle sera le fer de lance de la régulation en matière de cosmétique.

Années 80/90 : industrialisation de la cosmétique

Dans les 80 et 90, la chimie reste cependant prépondérante et très populaire. A l’époque, la science et la technicité sont les maîtres mots. Les grandes marques redoublent d’effort et de créativité pour développer de nouvelles molécules, telles que les céramides, le rétinol et le AHA par exemple. Cette période marque la fin des tests sur les animaux et le début des preuves cliniques. Les tests in vitro et in vivo, pour mesurer l’hydratation, la profondeur des rides apparaissent. Dans les années 90, les plantes font doucement leur apparition et certaines marques mettent en avant l’efficacité des plantes. Parmi elles, Clarins, Yves Rocher, The Body Shop, Klorane ou encore l’Occitane. Cependant les compositions sont très loin d’être 100% naturelles et ces marques furent accusées de Greenwashing.

Années 2000 : la montée en puissance du bio

Création de la charte Cosmebio

Les années 2000 marquent un réel tournant avec l’arrivée en force du bio et l’utilisation massive des allégations « sans » (sans parabènes, sans conservateurs…). En réponse au GreenWashing, 10 laboratoires en France ont créé leur charte Bio. La charte Cosmebio voit ainsi le jour en 2002. Elle vise à définir des pourcentages de naturalité et de bio obligatoires dans les produits finis et bannir certaines substances : conservateurs, colorants et parfums chimiques, etc. La création de ce label a suscité un réel engouement. Ainsi,  le nombre de marques spécialisées dans le bio s’est multiplié et la grande distribution commence à créer des corners dédiés.

Les substances controversées 

La cosmétique bio est réellement sortie de l’ombre en 2005, moment où 500 substances sont interdites dans les produits cosmétiques. Une large prise de conscience se produit sur les effets néfastes de cette industrie pour la santé et l’environnement.   En effet, cette même année, l’émission Envoyé Spécial diffuse un reportage pour dénoncer les effets des parabènes présents dans de nombreux produits cosmétiques dont le déodorant.  Les parabènes sont associés au cancer du sein. En réponse aux inquiétudes des consommateurs face à ces substances controversées, les marques (notamment bio) utilisent massivement des allégations « sans » pour rassurer les utilisateurs de leur produit.

Les marques conventionnelles s’adaptent 

Sous la pression des marques bio et des associations de consommateurs, le marché cosmétique conventionnel réagit. Les lancements de produits s’enchaînent (550 nouvelles références lancées en 2007 et 800 en 2008). Certaines marques reformulent en urgence et les grands groupes mettent plus de temps pour remplacer les substances controversées notamment les conservateurs. Malgré la volonté de formuler différemment, il faut des années avant de créer de nouveaux ingrédients. Certaines marques telles que Caudalie, L’Occitane ou encore Nuxe se démarquent à cette période à travers des produits mettant en avant des compositions végétales. Les grands groupes entament une politique d’acquisition de marques anciennes à l’image de L’Oréal avec le rachat de Sanoflore, ou encore l’Occitane avec le rachat de Melvita, etc. On assiste également à l’entrée des MDD sur ce marché. En 2006, il existait seulement 40 marques de cosmétiques bio en France et elles seront plus de 230 en 2010.

Années 2010 : émergence de la Clean Beauty

À partir de 2010 en France, le concept de Clean Beauty émerge sous l’influence des États-Unis mais surtout du fait de l’obligation de reporting RSE (responsabilité sociétale des entreprises). D’abord instaurée par l’article 116 de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) de 2001 pour les entreprises cotées en bourse puis étendue par la loi Grenelle 2 de 2011. La RSE est définie par la commission européenne comme l’intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec les parties prenantes. Une entreprise qui pratique la RSE va donc chercher à avoir un impact positif sur la société tout en étant économiquement viable. Concrètement, les entreprises concernées doivent inclure dans leur rapport annuel des informations sur les actions menées concernant les enjeux sociaux, sociétaux et environnementaux de leurs activités.

Entre 2018 et 2019, le marché se démocratise sous l’impulsion des géants de l’hygiène-beauté. En 2018, L’Oréal lance sa propre marque de cosmétique bio : La Provençale et multiplie les déclinaisons bio de ces marques emblématiques (Dop bio, Garnier bio, etc.) et rachète le groupe allemand Logocos Naturkosmetik, pionniers des cosmétiques bios et naturels avec les marques Logona et Santé. En parallèle, les parfumeries et grands magasins, valorisent leur offre de beauté bio et naturels au sein de corners dédiés, notamment à travers le référencement de DNVB.

L’ère de la Conscious Beauty

Depuis 2020, la crise sanitaire a intensifié des tendances de fond existantes. La prise de conscience des enjeux environnementaux et sociétaux est bien présente. Les consommateurs prêtent une attention particulièrement non seulement à la composition des produits cosmétiques mais également à l’éthique, l’équité, l’inclusivité, l’écologie et la cruauté animale. Les engagements des consommateurs passent aussi par une consommation plus responsable et ils sont prêts à sanctionner les entreprises qui ne se conforment pas à ces nouvelles exigences. Nous entrons dans l’ère de la Conscious Beauty !