The Circle: « Partager c’est faire le bien »

Après avoir passé une semaine de plus à surveiller les dernières innovations en marketing digital et à essayer de les appliquer au mieux à travers mes différentes missions de stage, j’ai décidé ce Samedi de décompresser en me rendant au cinéma. J’avais entendu parler quelques semaines plus tôt de la sortie d’un nouveau film, justement axé sur les nouvelles technologies. Qu’à cela ne tienne, je choisis donc d’aller voir : The Circle ! Attention, Spoiler !!!

 

The Circle

 

 

En résumé, le film trace les péripéties d’une jeune femme, plutôt discrète, Mae Holland, qui travaille au service après-vente d’une société américaine classique. Quelque temps plus tard, son amie Annie lui parle d’une opportunité exceptionnelle. Elle a réussi à lui réserver un entretien d’embauche pour « faire la même chose que maintenant, mais dans une vraie compagnie« , selon ses mots. Dans les séquences suivantes, on retrouve donc notre héroïne face à un recruteur lui faisant passer un entretien peu conventionnel, assez déstabilisant mais qu’elle réussit brillamment. Mae Holland est engagée chez The Circle, le groupe de nouvelles technologies et de médias sociaux le plus puissant au monde grâce à son système TruYou, qui abolit l’anonymat et unifie tous les services sur le Net.

Elle est introduite à son nouveau poste qui consiste à répondre aux utilisateurs du service, qui ont la capacité ensuite de noter leurs échanges sur une échelle de 100 pts. Plus le salarié se rapproche du nombre maximal de points, plus son travail est récompensé. A l’inverse, on ne sait pas réellement ce qu’il se passe pour ceux qui n’arrivent pas à faire décoller leur score, mais on le devine assez aisément. Cette entreprise est présentée comme le paradis de n’importe quel salarié: salle de sport, de concert, cours collectifs, boite de nuit, restaurants, airs de jeux, liberté et autonomie dans l’organisation de son travail, des supérieurs hiérarchique friendly et apparemment très humains, etc… sont au sein même des locaux de The Circle, non sans rappeler Google…

Le jour de son arrivée, une conférence est tenue par le directeur de The Circle; Eamon Bailey, interprété par Tom Hanks. On découvre alors un homme très charismatique, enjoué, bienveillant et visionnaire. Il présente sa société comme une grande famille, dans laquelle on ne doit pas se mentir ou se cacher. En effet, comme tous le répètent à l’unisson face à ce gourou des temps modernes: « Partager c’est faire le bien ». C’est à cette occasion également qu’il présente à l’assemblée sa dernière invention: une caméra presque invisible, connectée par satellite, qui peut être déposée n’importe où afin de filmer en temps réels. D’après lui, « savoir c’est bien, mais tout savoir c’est mieux » puisque la vraie démocratie dépend de la transparence de tous.

Au bout de quelques semaines, Mae est interpellée à son bureau par deux de ses collègues qui souhaitent savoir pourquoi ils ne l’ont pas vu aux activités du week-end. Constatant sa panique face à cet interrogatoire enveloppé de grands sourires, ils lui expliquent que la participation à ces activités extra professionnelles n’est pas obligatoires. Pour autant, elles sont fortement encouragées pour prouver son engagement au travail… C’est lorsqu’elle tente de se justifier, que l’on découvre que the Circle centralise toutes les informations de ses utilisateurs. L’entreprise sait littéralement tout de vous, de vos goûts, de vos habitudes, de vos relations et même de votre état de santé, y compris ceux de vos proches. Dans la foulée, ses collègues lui parlent du réseau social sur lequel elle doit avoir un compte afin de partager avec la communauté tout ce qu’elle fait quotidiennement: « Partager c’est faire le bien ». Ils lui expliquent que plus on partage sur son compte, mieux on est classé au sein du réseau, sans qu’il s’agisse là d’une échelle de popularité… ou peut être un peu…

Initialement réservée, Mae développe progressivement une addiction aux réseaux sociaux et à cette transparence totale. A la suite d’un accident dont elle est sauvée grâce au système de surveillance des caméras de Eamon Bailey, elle accepte d’être la première à en porter une sur elle au quotidien car « les secrets sont des mensonges« , déclare-t-elle à la foule. Mae devient l’égérie de The Circle, et les patrons de la boîte en font un exemple pour promouvoir leur système de caméras. Par la suite, Mae prend son nouveau rôle très au sérieux et même jusqu’à l’extrême en proposant des évolutions à la limite du totalitarisme…

Avec cette « anti-héroïne », le film aborde successivement les notions du tout-connecté avec la dictature des réseaux sociaux, l’abolition de la vie privée avec la transparence absolue et la faillite du système démocratique.

The Circle

The Circle est l’adaptation du roman éponyme de Dave Eggers qui dresse le portrait d’une société où les rapports troubles entre notion de vie privée et addiction aux réseaux sociaux viennent interroger les limites de la connaissance humaine et le droit à la déconnexion.

Malheureusement, le film n’arrive pas à transcrire réellement tous ces sentiments. J’ai été profondément déçue de cette mise en scène qui survole chaque situation sommairement, sans rentrer dans le détail des conséquences pour l’humanité. Malgré le très bon jeu d’acteur de Tom Hanks (comme à son habitude), les personnages restent sans profondeurs. Finalement, l’évolution de la personnalité de Mae n’est pas comprise à la fin du film et le spectateur est perdu face au chemin que l’héroïne décide d’emprunter. Chaque proposition d’innovation lancée par les différents personnages n’est pas approfondie. Par exemple, lors d’une réunion Mae propose de joindre tous les comptes TruYou aux listes du gouvernement afin d’obliger les citoyens à voter pour chaque élection. Il s’agit là d’une dérive importante de l’introduction des nouvelles technologies dans notre mode de vie. Pourtant, passé l’effervescence de tous les collaborateurs face à ce projet qui peut rapporter gros, le réalisateur du film n’a pas choisi d’argumenter plus que ça le propos. Une idée est lancée, mais ni sa mise en application, ni son évolution, ni ses conséquences ne sont exploitées. Il en va de même lorsque la démonstration publique du logiciel ultra-performant de recherche en temps réels de personnes à travers le monde vire au drame pour l’ami fidèle de Mae. C’est le sentiment qui prédomine pour l’ensemble du scénario, qui, à mon avis, est bien trop superficiel face à un sujet si profond.

Pour cette catégorie, après cette séance cinématographique, mon podium reste donc inchangé avec Black Mirror un chef d’oeuvre sur la première marche, suivi de près par le film Her de Spike Jonze puis par A.I Intelligence Artificielle de Steven Spielberg, ancien mais finalement si actuel…