Rencontre avec Simon Gauthier, chargé de production pour le Rex Club

« La fête a toujours su se réinventer et affronter différents défis » – Interview de Simon Gauthier, chargé de production du Rex Club

Simon GAUTHIER, chargé de production pour le Rex Club a accepté de répondre à mes questions dans une interview où il se confie sur son parcours, son métier et sa vision du milieu de l’événementiel musical.

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Le parcours

Quel a été ton parcours ?

J’ai commencé par une licence en information et communication à Bordeaux puis j’ai rejoins un D.U Administrateur/ producteur de projets musicaux à Nanterre. Formation dispensée par l’IRMA. J’ai effectué mon stage de stage de fin d’études au Rex Club où je suis en poste depuis en tant que chargé de production/ administration.

Quelles ont été les motivations qui t’ont poussées à te diriger vers ce poste/cette entreprise?

J’ai toujours été attiré par le milieu de la fête et de la nuit. Je suis également un grand fan de musiques électroniques, la possibilité de rejoindre une institution telle que le Rex Club fut une aubaine !

Comment décris-tu le métier de chargé de production? Où commence-t-il et où s’arrête-t-il?

Le métier de chargé de production recouvre de nombreuses facettes et surtout varie en fonction de la structure (club, salle, boîte de production, festival…).En ce qui concerne le Rex et un club en général, nous devons assurer toute la logistique autour de la venue de l’artiste (transports, hôtel, repas), s’assurer de ses besoins techniques, bien s’informer et respecter les contrats tout en essayant de négocier pour faire baisser un maximum les coûts pour le club. C’est un travail de communication et de négociations avec les agents, il est primordial d’être totalement transparent sur les conditions d’accueil autour de la venue des artistes pour éviter les mauvaises surprises.

Il y a également une partie administrative (factures, gestion des budgets, suivi des paiements etc…). Mais les missions ne s’arrêtent pas au bureau puisque le chargé de production doit rester actif et joignable en toute circonstance, c’est s’assurer que les vols/trains ainsi que les liaisons entre les gares/ aéroports aient bien lieu, être disponible pour répondre à tout imprévu/ difficulté que pourrait rencontrer l’artiste, être présent lors des concerts pour l’accueil, faire la liaison avec l’équipe technique etc…

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Le Rex Club

Comment définirais-tu l’éco-système du secteur d’activité en question?

La concurrence est parfois rude car le secteur est plutôt instable dû aux nombreux événements qui peuvent perturber la tenue d’un événement (météo pour les événements en extérieur, grèves, problèmes techniques, interdictions préfectorales, de rassemblement etc…) et d’un modèle économique extrêmement fragile. 

Cependant il existe aussi une grande solidarité au sein de ce secteur d’activité pour justement combattre ces difficultés qui nous concernent tous. Plus particulièrement pour le monde de la nuit et des musiques électroniques qui a du s’unir pour faire reconnaître la profession et la fête en tant qu’outil culturel. Cette vérité est encore plus frappante aujourd’hui à l’ère de la crise sanitaire.

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« Cette course à la meilleure offre impose un certain dictat aux programmateurs »

Si tu pouvais changer quelque chose de l’industrie musicale, quelle serait-elle et pourquoi?

Une rémunération plus juste et équitable des artistes. Les écarts de cachet sont aujourd’hui beaucoup trop importants et parfois non justifiés. Le cachet d’un DJ a par exemple été multiplié par 4 ou 5 ces 10 dernières années et met profondément en péril toute l’industrie.

Les agents jouent également le jeu des enchères (conscients de la volatilité de la notoriété de leurs artistes) et instaurent un climat de concurrence néfaste (surenchère) entre les acteurs du milieu.

Cette course à la meilleure offre pollue également la musique elle même, privilégiant les grosses structures aux acteurs vraiment engagés et surtout impose un certain dictat aux programmateurs, leur laissant moins de place pour les artistes découvertes, émergents.

La crise que nous traversons actuellement met en difficulté de nombreux acteurs du milieu et souligne la fragilité de la scène en situation de crise sanitaire. Penses-tu qu’il faille repenser le modèle des clubs et discothèques et penser à une nouvelle façon de faire la fête sur le long terme?

Personnellement je n’y crois pas du tout et je ne le souhaite pas. Les mesures imposées par la crise sanitaire vont à l’encontre même de la nature de la fête. En revanche repenser nos programmations (valoriser les artistes locaux, les artistes féminines, abandonner les courses à la tête d’affiche), s’intéresser à notre empreinte écologique (voyages, déplacements, moyens techniques et scénographiques, gestion et traitement des déchets etc…) me semblent être des pistes d’amélioration et nous pouvons profiter de cette crise pour repenser tout notre modèle et prendre en considération ces nouveaux défis.

Si cette crise peut permettre à d’autres acteurs de la fête de tirer leur épingle du jeu (petits formats, petits rassemblements), cela serait également bénéfique pour toute la scène : mise en avant d’artistes émergents, intérêt grandissant du public pour la scène dans sa globalité et plus seulement que pour les 20 ou 30 plus gros artistes internationaux. Il ne faut cependant pas oublier que les gros rassemblements (festivals, warehouse etc…) font également partie de notre écosystème et qu’ils doivent perdurer pour faire vivre tous les acteurs de la fête (équipes techniques, administratives, artistes, prestataires, agents etc…).

Quoiqu’il arrive la fête a toujours sur se réinventer et affronter différents défis. Je ne suis absolument pas inquiet pour son avenir, si la fête doit reprendre le chemin de l’illégalité ou du moins une forme plus sauvage durant quelques années, elle reviendra un jour ou l’autre dans nos clubs et nos salles de concert car une industrie culturelle ne peut aujourd’hui survivre sans un appui public et institutionnel.

« Les mesures imposées par la crise sanitaire vont à l’encontre même de la nature de la fête. »

Le Rex Club est aujourd’hui considéré comme un temple de la musique électronique à travers le monde, qu’est ce qui selon toi, lui permet de perdurer et de se renouveler?

Je pense qu’il s’agit avant tout de son histoire, de sa stabilité et de tout ce que représente le Rex sur la scène internationale. Il est et restera une institution de la nuit et de la musique électronique, le Rex a toujours su s’adapter aux différents courants musicaux mais a également traversé les nombreuses crises de ces 30 dernières années.

En plus de sa notoriété, le club bénéficie d’une image de stabilité et de confiance que ce soit concernant l’accueil, la technique et le public. Ces atouts, développés par toutes les équipes qui ont porté le Rex durant plus de 30 ans, font du club une place forte incontournable de la scène internationale tant pour les artistes, le public et les professionnels du secteur.