Récit d'une aventure Indonésienne

Récit d’une aventure

Depuis maintenant 6 ans je travaille dans le milieu de la plongée sous-marine. J’y bâtie mon expérience, mes armes et je conjugue tout cela à mes passions : L’océan et le voyage.

Cela ne m’a pas empêché de réaliser des stages dans d’autres milieux, d’autres entreprises, d’autres pays, car il est évidemment important de visiter d’autres secteurs, d’explorer d’autres façons de travailler, pour ainsi répondre à cette question que nous nous posons depuis le jour où nous avons quitté le lycée : Où allons-nous ?

L’année dernière, j’ai dit au revoir à un projet professionnel magnifique. Cette même année a été l’expérience professionnelle la plus dure que j’ai eu de toute ma « carrière », mais cette année-là, j’ai le plus appris sur l’environnement professionnel, la gestion d’une entreprise, le management et sur moi que je ne l’ai fait depuis le début.

Je vais vous raconter comment, en Indonésie, en 2018, nous avons dû gérer pendant 1 an, des catastrophes naturelles, le boom touristique d’une région, des Bad buzz aériens, des problèmes de gestions de staffs et surtout la vie d’un club de plongée et d’un hôtel, à Komodo, en Indonésie, dans un environnement où la concurrence est rude, déloyale et surtout passionnante.

C’est un soir de 2015 que nous avons commencé l’aventure Dragon Dive Komodo. Ça a été la conjugaison de trois rêves, trois personnes passionnées.

L’un rêvait d’avoir un bateau en bois dans un style pirate, je pense qu’il rêvait du Black Pearl** en quelques sortes ?

L’autre rêvait d’aller plongée à Komodo, connu pour sa biodiversité unique au monde et ses ballets de Ray Mantas.

Et moi je rêvais de pouvoir un jour participer à la création d’un centre de plongée et bien sûr de le développer par la suite.

http://www.mbadmb.com/wp-content/uploads/2020/02/41392584_10156497470579336_6019436406676389888_o-300×300.jpg

Dès le lendemain matin, nous étions tous les trois sur un ordinateur à imaginer un bateau, démarrer un business plan et réserver des billets d’avions pour partir à Labuan Bajo, la petite ville portuaire, qui n’est autres que l’entrée du Parc National de Komodo.

Nous voulions au début démarrer un Liveaboard (un bateau de croisière plongée), donc aucune structure physique sur Labuan Bajo. Puis, nous avons vu le potentiel du lieu, une petite ville de pécheur qui bientôt sera en pleins boom touristique. L’aéroport venait d’ouvrir, le parc de Komodo était patrimoine mondiale de l’UNESCO, les routes étaient en train d’être faites et les lumières des premiers hôtels commençaient à scintiller.

Nous avons visité bateaux et terrains, nous avons plongée, trinquer la nouvelle année de 2016 là-bas, comme un signe de courage et de chance. Nous avions le sentiment que nous pourrions réaliser de belles choses ici et faire avancer Labuan Bajo dans sa volonté de développement, nous ne nous étions pas tellement trompés.

C’est ainsi qu’en février 2016, nous faisons le choix de créer finalement une structure physique, nous avons donc acquis un premier bateau, qui nous servira de « Daily » (bateau qui fait des plongées à la journée seulement), puis nous avons démarré dans la foulée la construction de DRAGON DIVE KOMODO, hôtel et centre de plongée. Les travaux prendront un an et demi, nous ouvrons finalement les portes le 18 juillet 2017, avec 6 mois de retard sur le plan initial. Bienvenue en Indonésie.

Nous avons ouvert au pire et meilleur moment. La haute saison de la région avait commencé, Bali et Lombok étaient noirs de monde et Komodo commençait à faire parler d’elle. Nous avions beaucoup travaillé en amont sur la communication et le marketing de Dragon Dive Komodo, nous avions fait des salons, le site était prêt et surtout nous étions déjà sur toutes les plateformes de réservations. Je m’occupais de vendre Dragon Dive Komodo aux tours opérateurs français et de faire résonner dans la tête du plus grand nombre que bientôt, Dragon Dive Komodo, le seul club français de la région, allait ouvrir ses portes.

Nous étions complets dès le deuxième jour de la mise en ligne de Dragon Dive Komodo. Ce qui nous a ravi et en même temps donné beaucoup de fil à retordre, car nous n’avions pas anticipé certains problèmes auquel nous avons dû faire face avec cette fois, une clientèle à gérer.

Aujourd’hui Dragon Dive Komodo c’est….7 chambres privées, 8 chambres en dortoir, 2 bateaux Daily de 20 places, 2 liveaboard avec trois types de cabines pour une capacité de 12 personnes et surtout : 40 salariés, dont 10 expatriés.

La concurrence est plutôt rude dans le milieu de la plongée. C’est un marché de niche dans le secteur du voyage. La concurrence internationale dans un premier temps, chaque destination plongée doit vendre au mieux ses fonds marins. Ensuite, vous avez une concurrence sur le local et c’est là que les choses se compliquent.

A Labuan Bajo, nous pouvons recenser aujourd’hui prêt de 80 clubs de plongée et croisières, dont seulement 20% sont 100% légaux et 20% autres sont semi-légaux. A titre d’exemple, Bali c’est 400 clubs de plongée, mais Labuan Bajo est une ville qui fait 2km de long.

Chacun de ses clubs se batte pour récupérer le plus de monde possible, car évidemment, il n’y a pas assez de touristes pour tout le monde, même si le tourisme augmente, l’offre reste encore supérieure à la demande.

Également, chaque club travaille sur sa nationalité au maximum et essaie d’empiéter sur le marché de l’autre. Nous étions le seul club français de Komodo et travaillions alors beaucoup sur notre marché, mais nous travaillions également beaucoup sur le marché asiatique et américain, qui arrivait de plus en plus chez nous en Indonésie.

D’un point de vue communication, 45% de mon temps de travail, je le passais à la discussion avec mes clients. Je les accueillais, les invitais à nous rejoindre sur des tours de plongée, à la totale découverte pour certains et surtout je les orientais sur leur voyage. Il était très important pour nous d’avoir une belle image de la part de notre clientèle, il était très important dans un business comme le nôtre de montrer notre présence à nos clients, pour d’abord leur permettre de se sentir en sécurité et surtout personnalisé leur expérience chez nous au maximum. C »est ainsi que je gardais ma clientèle de l’hôtel et les « empêchais » d’aller plonger ailleurs.

C’était en passant du temps avec eux, que je pouvais créer du contenu pour les réseaux sociaux, cibler mes postes ou encore réfléchir à ce qu’attendaient les clients comme animations sur place et me permet de réfléchir à comment convertir les prochains. Mes 45 autres % de mon temps, sont pour l’hôtel et pour la gestion des équipes hôtels et des plannings. En revanche, je ne m’occupais absolument pas des bateaux, je n’aime pas la mécanique et je n’y comprenais rien du tout. Enfin mes 10 derniers % me permettait de préparer les salons et tout le contenu marketing qui vont avec, à travers des outils divers tel que la suite Adobe, InDesign, Photoshop, première pro et after effect pour la vidéo, mais aussi Corel Draw que je préfère 100 fois à Illustrator BTW.

Cette année 2018, nous avons dû faire face à de nombreux Bad Buzz en Indonésie. Nous avons été plutôt secoués par les tremblements de terre de Lombok, Noyé par les tsunamis en Sulawesi et à Sumatra et sur le quai vive avec Bali au bord de l’éruption volcanique depuis 1 an. Tous ses évènements ont provoqué une situation très compliquée pour l’Indonésie qui a vu de nombreux vols pleins de touriste s’annuler. Il faut dire que le Crash d’avion de Lion AIR, une compagnie low-cost indonésienne, n’a pas vraiment rassuré les gens à venir.

Alors, nous avons travaillé là aussi, notre communication au mieux. Nous avons envoyé et répondu aux mails de nos futurs clients un peu affolé, nous les avons rassurés, nous les avons informés au mieux de la situation sur la place et expliqués que nous, à Flores nous étions très chanceux, c’est une île très très protégées de toutes catastrophes naturelle. « Les dragons de Komodo sont les derniers dinosaures, vous imaginez bien que s’ils sont toujours là, c’est qu’ils sont bien protégés ».

http://www.mbadmb.com/wp-content/uploads/2020/02/maxresdefault-300×300.jpg

Nous avions essayé de rassurer au mieux les gens, de les conseiller et surtout de leur faire oublier le traumatisme vécu à Lombok et de leur faire terminer leurs vacances en beauté avec nous. Dragon Dive Komodo est passé d’un simple petit hôtel/hostel, à une expérience à part entière.

Nous avions également, en interne, fait de notre mieux pour aider nos amis Sasak, car nous avions tous le cœur lourd de ce qu’il s’était passé là-bas, ça avait été tout de même notre maison à tous pendant longtemps avant de créer Dragon Dive Komodo.

J’étais moi-même à Lombok pendant la semaine des tremblements de terre avec ma petite sœur et ma meilleure amie qui étaient venues me rendre visite. Nous avions organisé des collectes, nous étions allés chercher de la nourriture et de l’eau pour les populations du Nord et du centre, qui avait tout perdu et nous avions surtout, chercher et aider nos « anciens » staffs locaux avec qui nous travaillions quelques années plus tôt qui sont heureusement tous en vie. J’ai en revanche, refusé d’utiliser ce moment catastrophe pour communiquer sur Dragon Dive Komodo, il m’a paru important de ne pas utiliser le malheur des uns, pour promouvoir notre business. Nous avions fait ce que nous avions à faire, c’était pour nous : le plus important. En revanche, nous avions communiqué beaucoup sur les réseaux en montrant nos bateaux pleins et nos clients présents et heureux d’être là pour rassurer sur notre destination.

http://www.mbadmb.com/wp-content/uploads/2020/02/P1011827-300×300.jpg

Chaque année depuis notre création, nous avions un emploi du temps bien chargé à travers 3 continents. Nous devions nous faire connaitre, convertir et surtout récupérer des contrats d’agence à travers le monde. C’est pourquoi, nous participions à de nombreux salons spécialisés, entre autres, ceux de la plongée, dans le monde entier. Nous avons commencé par l’Ouest, en novembre 2018 avec le DEMA Show à Las Vegas. Las Vegas est un pôle très stratégique aux USA. Connu principalement pour ses Casino, Las Vegas est surtout une ville de salons, de conventions et de congrès. Le DEMA Show est un salon 100% professionnel, contrairement aux autres expositions dans le monde, qui sont ouvertes au grand public.

En décembre 2018, nous sommes retournés sur notre continent, nous avons exposé au DRT Show à Hong-Kong. Un salon ouvert cette fois-ci au grand public. Le DRT SHOW était salon que nous connaissions, que nous avions déjà fait plusieurs fois. Hong-Kong est un salon très intéressant pour cibler le marché chinois. C’est un point très stratégique pour toucher ce marché.

En janvier 2019, nous avions fait notre salon préféré, celui que nous maîtrisions le mieux : PARIS. Nous voilà de retour chez nous, notre langue, nos codes. Mais contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, c’est de loin le salon le plus difficile que nous faisions. Les français sont très difficiles en plongée et surtout très exigeants. Si je devais définir le marché du tourisme français aujourd’hui je dirais : « Les français souhaitent le standing et le service du Four Seasons au prix d’un formule 1 ». Et dieu sait qu’il n’y pas plus vrai.

Enfin, une semaine plus tard, je me suis rendue au salon nautique de Düsseldorf, le plus gros salon nautique du monde, 8 halls, dont un complètement dédié à la plongée. Je m’y suis rendue en visiteur simple, un moyen pour moi d’appréhender ce salon, de savoir s’il était nécessaire de s’y rendre l’année prochaine, de discuter avec les acteurs majeurs du marché allemand, qui est un marché très compliqué et qui est un marché à part entièrement au même titre que le marché français. Ses agences, ses exigences et ses fédérations. La conclusion était pour moi, qu’il n’est pas nécessaire d’y exposer Dragon Dive Komodo, nous n’étions pas encore assez mure pour attaquer le marché allemand, déjà quasi saturé.

http://www.mbadmb.com/wp-content/uploads/2020/02/P8193466-300×300.jpg

Alors où allons-nous ?

C’est cette question que je n’ai cessée de me poser ces derniers mois. Où vais-je ? j’ai vécu une véritable remise en question, cette année-là, a été pour moi la plus dure d’un point de vue personnel car je n’avais plus aucune réponse. J’ai été très affectée par les tremblements de terre à Lombok, qui m’ont mis une véritable claque. Je ne supportais plus après ça d’être en Indonésie, j’avais peur, le moindre coup de vent était une mise en alerte pour moi. Partir en novembre aux USA pour le DEMA show, a été une vraie bouffé d’air. A travers ce salon, j’ai rencontré et retrouvé énormément de gens. Des petits projets que j’avais en tête se sont mis à mûrir.

Il était de plus en plus clair pour moi que je ne voulais finalement plus vivre en Indonésie. J’aimais cet endroit comme ma maison, mais je ne m’y sentais plus bien, j’ai donc décidé de partir. J’ai suivi à distance l’évolution du centre et de l’hôtel, jusqu’à complètement me sortir du sortir du projet en juillet 2019, et aujourd’hui j’aime encore plus ma nouvelle maison, mes nouveaux projets.

Je vous raconte cette petite histoire, pour vous dire combien il est important finalement de vivre ses rêves, que l’échec n’en est pas toujours un et qu’il faut valoriser ses échecs comme une réussite. Je l’ai compris il y a très peu de temps.