Pourquoi des agriculteurs deviennent-ils influenceurs?

Nous connaissons tous à quelqu’un qui est notre « idole » sur les différentes plateformes : Instagram, Facebook, Twitter, TikTok, YouTube. Certaines de nos idoles suivies par beaucoup de monde sont repérées par des marques et deviennent des influenceurs.

La définition du Larousse pour le mot « influenceur » est la suivante : « Personne qui, en raison de sa popularité et de son expertise dans un domaine donné (mode, par exemple), soit capable d’influencer les pratiques de consommation des internautes par les idées qu’elle diffuse sur un blog ou tout autre support interactif (forum, réseau social, etc.)»

Depuis 2021, un nouveau mot est apparu dans le Petit Larousse. Ce mot c’est « l’agri-influenceurs ». Pourquoi ce mot est apparu? Voici un petit bout de son histoire.

Nous le savons tous car nous le voyons dans la presse, sur les réseaux sociaux, à la télé depuis de nombreuses années, l’agriculture et la ruralité sont pointées du doigt, et voici pourquoi:

  • Des associations luttant contre l’élevage intensif.
  • Des urbains viennent en milieu rural pour y avoir un autre cadre de vie mais râlent car les agriculteurs mettent des pesticides pas loin de la maison, passent dans le village avec un tracteur et mettent de la terre sur la route ou encore l’odeur de la vache présente dans la ville car il y a une ferme.
  • Un coq nommé Saturnin qui faisait du bruit dans un village de l’Aude car il chantait et cela dérangeait les voisins.
  • Un couple en Gironde condamné car les grenouilles de leur mare font trop de bruit.

C’est à ce moment-là que vous vous posez la question : Pourquoi influence et agriculture ? Oui vous pensez que ce sont deux choses complètement différentes mais en réalité ces deux mots peuvent être accordés.

Au départ, très peu d’agriculteurs étaient les réseaux sociaux mais avec l’inflation, les nouvelles normes de l’UE, la réglementation, etc.. Des coups de gueule de certains ont réveillé les esprits pour exprimer leurs mécontentements mais aussi la difficulté de leur métier.

La présence d’agriculteurs sur les plateformes numériques a commencé avec la colère d’un agriculteur du Cantal qui voulait que le gouvernement réagisse face aux dégâts causés par les rats taupiers. Ce coup de gueule a fait le buzz car la vidéo a obtenu des milliers de vues en quelques heures.

Ses agri-influenceurs présents sur YouTube, TikTok, Instagram, et Twitter avec des milliers d’abonnés ont des partenariats que beaucoup refusent car ils préfèrent préserver leur métier mais aussi par rapport à la consultation publique qui était ouverte du 8 au 31 Janvier par le ministère de l’Économie et des Finances sur les droits et les obligations des influenceurs.

Aujourd’hui dans le monde d’après une étude d’Adobe, nous avons 303 millions de créateurs de contenus . En France nous ne comptons pas moins de 150 000 influenceurs qui présentent des produits à tester, codes promotionnels, création de vidéos. Et d’après une enquête de Rakuten, 8 personnes sur dix vont effectuer un achat à la suite des recommandations de l’influenceur.

Sur Twitter, depuis 2017, la création d’une association regroupe des personnes du monde agricole. La grande majorité sont des agriculteurs. Le but est de recréer du lien entre le monde agricole et la société, d’expliquer le métier sans trop d’intermédiaires.

Sur YouTube, des agriculteurs filment leur quotidien et cela fait plaisir aux publics car ils génèrent des dizaines de milliers d’abonnés. A travers les vidéos, les agri-youtubeurs essayent de lutter contre « l’agri-bashing » qui est de plus en plus présent depuis le début de l’année 2023. Cette pression et le mépris des organisations environnementales et retranscris par les médias agacent les agriculteurs.

Sur TikTok et Instagram, les agriculteurs arrivent plus souvent à montrer leur profession car l’accessibilité aux contenus est plus facile à travers des photos et des vidéos. L’engagement que met en place l’agriculteur peut générer une demande de partenariat avec une marque.

Cet agriculteur et Tiktokeur nommé Agricoolteur, ne compte pas moins de 400 000 abonnés. Pendant une interview pour le journal de la France Agricole, il disait : « Je parle de partage, de bon sens et d’intérêts. Si le partenariat consiste en un placement de produit qui n’a rien à voir avec le boulot, je n’y vais pas. » Nous pouvons donc voir que l’intérêt n’est pas de gagner de l’argent sur un placement de produit mais de montrer son métier sur les réseaux sociaux. Son but est de casser les préjugés sur le métier d’agriculteur et le monde agricole. Ce TikTokeur a même eu un partenariat avec le ministère de l’Agriculture pour encourager les jeunes à s’inscrire dans des lycées agricoles. Sur Instagram d’après un article de BDM, si un influenceur a plus de 500 000 abonnés, il pourrait gagner entre 4000 et 20 000 euros.

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Les tarifs moyens par post par typologies d’influenceurs sur les réseaux sociaux en 2020. © Kolsquare

D’après Hubspot, le marché mondial de l’influence a explosé de 800% ce qui laisse la place à nos agriculteurs pour exposer sur les réseaux sociaux leur quotidien.

Focus sur des agris-influenceurs :

  • Voici Océane Agricultrice qui est agri-youtubeuse avec 43 300 abonnés et qui partage son métier au quotidien: l’ensilage, la moisson, les semis. Elle fait des vidéos sur la présentation de nouveaux outils mais encore elle explique son parcours, ses projets.

  • Un autre Agri-youtubeur originaire du Pas-de-Calais c’est Thierry Bailliet alias Thierry agriculteur d’aujourd’hui qui veut montrer cette passion de l’agriculture mais aussi d’expliquer son métier au-delà des clichés. Il est l’auteur d’un livre « Dans les bottes de ceux qui nous nourrissent  » qui a pour but de proposer à chacun, chacune d’enlever ses chaussures, talons et baskets et de mettre ses bottes d’agriculteurs. Un livre 2.0 existe qui rassemble des références, des reportages et portraits vidéo.

  • Toujours sur YouTube, Simon Legendre sous le nom de lesagri51 ne réalise pas de vidéos pour lui-même mais pour des clients. Il a commencé par faire des tournées à vélo pour voir les machines agricoles dans les champs puis a débuté par faire des vidéos et les exposer sur la plateforme YouTube. Voyant l’ampleur de ses vidéos, il lance son entreprise de prestation de vidéos et de photos.

  • Sur Instagram, Andréa Catherine partage sa vie et veut mettre en avant des produits qu’elles aiment. Elle a maintenant des propositions de partenariats. Dans un article de la France Agricole, elle disait: « Je mets en avant des produits mais cela prend du temps car il y a la ferme à côté. Je ne demande aucune rémunération aux marques ».

  • Sur Instagram, c’est aussi Perrine Raymond qui est suivie par beaucoup de monde et enregistre plus de 200 000 abonnés sur les réseaux sociaux. Son but est de montrer son quotidien. Perrine travaille avec une agence qui gère ses partenariats et négocie ses droits. Elle choisit les produits qu’elle veut mettre en avant et qui ont un lien avec son activité agricole. Elle ne veut pas mettre en avant des produits phytopharmaceutiques mais plus des vêtements, des outils, ou des machines agricoles.

Aujourd’hui nos agriculteurs veulent partager leur quotidien à travers des vidéos, photos et articles dans la presse. Il est important de préserver le lien avec celles et ceux qui nous nourrissent tous les jours.