Dans le cadre de mon mémoire de fin d’étude, je me suis penché sur l’impact de la transformation numérique dans l’industrie musicale. En effectuant mes recherches, je me suis rendu compte assez rapidement des nombreux changements qui ont bouleversé une industrie, alors vacillante depuis le début des années 2000.
L’arrivée d’internet et des nouveaux médias sociaux ont eu un impact majeur sur la façon dont est produite, consommé, voire même perçu la musique de nos jours.
Dans cet article, je souhaite revenir sur un certain nombre de ces transformations dû à la numérisation/digitalisation de cette industrie.
L’évolution des supports de distributions, et l’arrivée d’internet
L’arrivée d’internet à la fin du XXe siècle a marqué un changement majeur dans la façon dont la musique était distribuée et consommée.
Auparavant, la musique était principalement distribuée sur des supports physiques tels que les disques vinyles, les cassettes et les CD. En arrivant dans les foyers, internet a rendu possible la distribution de la musique sous forme numérique, donnant aux utilisateurs l’accès à une vaste bibliothèque de musique qui peut être écoutée en continu ou téléchargée à tout moment. Cette commodité a rapidement fait de la musique numérique le format préféré des initiés de l’industrie musicale et des auditeurs ordinaires.
Dans le même temps, internet a également permis l’émergence d’artistes indépendants, qui ont pu contourner les canaux traditionnels et atteindre un public mondial avec leur musique. Ces nouveaux outils ont permis une connexion plus directe entre les artistes et les fans, sans qu’il soit nécessaire de recourir à un intermédiaire tel qu’une maison de disques.
Plus récemment, de nouvelles possibilités de commercialisation et de distribution ont émergé, comme les services de streaming et les plateformes de médias sociaux (exemple TikTok).
L’évolution des médias de distribution de la musique est donc intimement liée aux innovations technologiques et aux changements des normes culturelles. Avec du recul, l’arrivée d’Internet a joué un rôle central dans la formation du paysage musical moderne.
Les plateformes de streaming, un engouement justifié ?
Ces dernières années, la façon dont les gens consomment la musique a radicalement changé. Alors que les auditeurs achetaient autrefois des CD ou téléchargeaient des morceaux individuels, ils écoutent désormais de la musique en streaming sur des plateformes telles que Spotify et Apple Music. Ce changement a eu un impact majeur sur l’industrie musicale, le streaming représentant désormais la grande majorité des ventes de musique (62,1% des revenus de l’industrie selon le GLOBAL MUSIC REPORT 2020 de l’IFPI). Cependant, il a également suscité des inquiétudes quant au pouvoir de ces plateformes et à leur capacité à contrôler le marché de la musique.


L’essor du streaming a été motivé par la commodité et le caractère abordable de ces nouveaux services. Plutôt que de payer pour des chansons ou des albums individuels, les auditeurs peuvent désormais accéder à des millions de titres moyennant un abonnement mensuel. Cette évolution a rendu la musique plus accessible que jamais, mais elle a également entraîné une baisse des revenus des artistes et des labels.
En effet, la majorité des revenus du streaming sont générés par une poignée d’entreprises seulement. Spotify et Apple Music dominent le marché, tandis que d’autres plateformes comme Amazon Music et YouTube Music sont à la traîne. Cette concentration de pouvoir signifie que ces entreprises ont un niveau de contrôle sans précédent sur la musique qui est écoutée par des millions de personnes chaque jour.

Si le streaming a apporté de nombreux avantages aux auditeurs, il a également eu un effet néfaste sur l’industrie musicale. La monopolisation du marché par quelques entreprises puissantes a entraîné une baisse des revenus générés par les artistes. De plus, ces entreprises ont profité de leur position pour dicter leurs conditions aux fournisseurs, ce qui a entraîné des salaires et des conditions de travail médiocres pour de nombreux musiciens. L’essor du streaming a donc eu un impact profond sur l’industrie musicale, dont les conséquences à long terme ne sont pas encore totalement comprises.
Dans un rapport de 2021 publié par la SNEP, on remarque une corrélation entre l’augmentation du temps d’écoute hebdomadaire et les supports de diffusions dominants.
Parmi les plus importants, on relève en première position le streaming audio par abonnement (22%), le streaming vidéo (21%), la musique diffusée à la radio (19%), mais également le streaming audio financé par la publicité (12%).
Preuve que les supports numériques ont pris l’ascendant sur les supports physiques qui impliquent l’achat de musique (9%).
Selon L’IFPI, “l’écoute de musique continu de progresser dans le monde avec 18,4h par semaine, soit l’équivalent de 368 morceaux de trois minutes” – Source: SNEP
L’essor des réseaux sociaux et leur utilisation dans le monde musical
Comme évoqué dans l’introduction de cet article, les différents réseaux et médias sociaux ont eux aussi apporté leur pierre à l’édifice.
Ces dernières années, les réseaux sociaux ont pris une place de plus en plus importante dans le monde de la musique. Les artistes les utilisent pour entrer en contact avec leurs fans et promouvoir leur travail, tandis que les labels et les salles de concert les utilisent pour atteindre des clients potentiels. Aujourd’hui ces médias sociaux sont régulièrement utilisés pour créer un engouement autour des nouvelles sorties et des événements en direct. Dans certains cas, les réseaux sociaux ont même été utilisés pour lancer des carrières ; pour citer un exemple, Justin Bieber a notamment été découvert grâce à YouTube en 2007.
Plusieurs raisons expliquent l’essor des réseaux sociaux dans l’industrie musicale.
Tout d’abord, ils offrent aux artistes un moyen peu coûteux d’atteindre un large public.
Ensuite, ils permettent aux fans de se connecter les uns aux autres et de partager leur amour de la musique.
Enfin, les réseaux sociaux offrent aux professionnels de l’industrie musicale un moyen d’entrer en contact les uns avec les autres et de partager des idées.
On remarque également que certains artistes comme le rappeur Damso ou encore le duo PNL, ont des stratégies marketings essentiellement basées sur les réseaux. Cela évite les intermédiaires, ils peuvent ainsi promouvoir leur art comme ils l’entendent, et gérer leur image auprès de leurs communautés de fans.
La rareté de leurs sorties médiatiques fait de chaque tweet, chaque post sur les réseaux sociaux, un véritable évènement que les fans attendent avec impatience.

Une pratique devenue courante aujourd’hui pour les artistes de l’ère 2.0, est de supprimer/vider leurs comptes de tous leurs contenus. Parfois cela peut signifier un changement de direction artistique, parfois un simple besoin de repartir de zéro.
Prenons l’exemple de Damso cette fois-ci. En 2019, l’artiste Belge supprime tous les posts de son compte Instagram en ne laissant qu’une nouvelle photo de profil. Cette photo intrigue ses fans qui se demandent alors si quelque chose ne serait pas en approche comme un projet ou un retrait de la scène. Quelques semaines plus tard, après de nombreuses recherches de ses fans, on apprendra qu’il teasait un nouvel album Lithopédion.

L’IA dans la musique : va-t-elle remplacer, ou servir les artistes ?
Il existe aujourd’hui un certain nombre de logiciels capables de générer des compositions originales à partir d’un ensemble de paramètres fournis par l’utilisateur. Si certains y voient une menace pour l’avenir de la musique, d’autres pensent que l’IA peut être un outil puissant pour les artistes.
L’un des avantages de l’utilisation de l’IA pour créer de la musique est qu’elle peut contribuer à faire tomber les barrières pour ceux qui n’ont pas accès à une formation musicale traditionnelle. En fournissant une plateforme permettant à quiconque de créer des pièces musicales complexes, l’IA a le potentiel de démocratiser l’industrie musicale. Dans le même temps, la musique générée par l’IA peut également servir d’inspiration aux compositeurs humains. En écoutant les créations de l’IA, les artistes peuvent se faire une idée de la manière dont ils pourraient aborder leur propre travail.
Ce dernier point est d’ailleurs très actuel. En 2017, l’artiste belge de renommée mondiale Stromae a réalisé une co-production sur son titre Hello Shadow à l’aide d’une intelligence artificielle appelée “Flow Machines” (source : lefigaro.fr). En générant des sons, des ambiances, des accords et des paroles, elle a permis à l’artiste belge d’envisager différentes directions artistiques pour son morceau.

Ce n’est pas la première fois qu’une IA est utilisée dans un projet musical. Dans la fin des années 50, un programme du nom d’Illiac avait réussi à composer une suite pour le morceau Quatuor de cordes avec la participation du compositeur américain Lejaren Hiller
https://www.youtube.com/watch?v=n0njBFLQSk8&t=1sDes intelligences artificielles bientôt artistes ?
C’est une des grandes questions que l’on est en droit de se poser.
Nous comprenons alors que l’IA a pour but de “reproduire” des comportements humains. Le problème est donc là, la musique est un art de création, de composition et non de reproduction. Les détracteurs de l’utilisation de l’IA pour créer de la musique affirment que les résultats manquent souvent de l’âme et de l’émotion provenant de la musique créée par des humains.
Cependant, à mesure que la technologie de l’IA se développe, il est probable que ces préoccupations se dissipent. À mesure que l’IA comprendra et reproduira mieux les émotions humaines, la frontière entre la musique créée par l’homme et celle créée par la machine deviendra de plus en plus floue. La question qui se posera dès lors sera de savoir si l’intelligence artificielle sera mise au service des artistes, ou si elle deviendra à son tour un artiste aguerri.
Quoi qu’il en soit, il est clair que l’IA modifie le paysage de la composition musicale, et son impact ne fera que croître dans les années à venir.
