Les femmes qui luttent depuis plusieurs décennies pour aboutir à l’égalité entre les sexes, auront-elles finalement gain de cause grâce au numérique? Entre incertitude et optimisme, des féministes tentent de répondre.

Selon les données disponibles, 30 % de femmes environ sont actives dans le monde du numérique. Ce pourcentage monte à 46,8 % dans tous secteurs d’activité confondus. Dans ce milieu, comme dans beaucoup d’autres secteurs de la société, l’égalité-homme femme n’est toujours pas une réalité malgré les nombreux mouvements de masse qui s’intensifient de jour en jour grâce aux nouvelles technologies. Dans cet ordre d’idée, l’ONU-Femme vient de dévoiler les données du rapport Gros plan sur l’égalité des sexes 2022 d’ONU-Femmes qui indiquent qu´ : « À l’échelle mondiale, les femmes n’occupent que 2 emplois sur 10 dans les sciences, l’ingénierie, les technologies de l’information et de la communication (TIC). Dans les 20 plus grandes entreprises technologiques mondiales, les femmes représentent 33 pour cent de la main-d’œuvre en 2022, mais occupent seulement un poste de direction sur quatre ».
Cet écart important entre les sexes dans le secteur numérique a des incidences sur l’économie de plusieurs pays, notamment ceux en voie de développement. Les données du rapport Gros plan sur l’égalité des sexes 2022 d’ONU Femmes indiquent que : « l’exclusion des femmes du monde numérique a réduit de 1 000 milliards de dollars US le produit intérieur brut des pays à revenu faible et intermédiaire au cours de la dernière décennie. Sans action, cette perte atteindra 1500 milliards de dollars US d’ici à 2025 ». Des chiffres alarmants qui prouvent que la route vers l’égalité complète sera longue. Consciente du problème, l’ONU-Femmes décide de mettre l’accent sur le numérique dans le cadre de la commémoration de la Journée mondiale de la lutte des femmes pour l’année 2023. Cette journée sera célébrée autour du thème « Pour un monde digital inclusif : innovation et technologies pour l’égalité des sexes ».
« Ce mouvement lancé par l’ONU Femmes est nécessaire en vue non seulement d’accroitre la présence des femmes dans ce domaine porteur, mais aussi de les offrir de meilleures opportunités. Car, l’utilisation ou non de la technologie peut aggraver ou atténuer les inégalités de genre », confie Ketleine Charles, militante et professeure d’université en Haïti.
Pour la militante féministe et entrepreneure Daniella Jacques : « la technologie a le potentiel d’aider à atteindre l’égalité des sexes et à autonomiser les femmes et les filles dans le monde entier, mais il est important de reconnaître que la technologie à elle seule n’est pas une panacée. Il est également important de s’attaquer aux facteurs sociaux, culturels et économiques sous-jacents qui contribuent à l’inégalité entre les sexes et de veiller à ce que la technologie soit utilisée de manière inclusive et équitable ».
Dans un autre fil d’idée, la militante féministe Sabine Lamour, également professeur d’université, sans équivoque, rejette cette affirmation de l’ONU Femmes. Selon elle, c’est une illusion de penser qu’un outil peut à lui seul résoudre tous les problèmes de l’égalité entre les sexes. Elle reconnait que le numérique est important pour l’avenir du mouvement, mais elle pense que si nous voulons de meilleurs chiffres, nous devons éduquer différemment les hommes et les femmes afin d’avoir des citoyens plus engagés et responsables. Elle préconise aussi que l’égalité soit prise en compte dans tous les domaines, pas seulement dans le secteur du numérique. « L’égalité est une nécessité », soutient-elle.