Lorsqu’on est cadre dans une société du CAC40 depuis 11 ans, plonger dans l’univers du digital et des startup sociales, c’est toucher du doigt un sujet dont on entend parler depuis toutes ces années mais qu’on n’ose à peine aborder.
Lors de ma première semaine de cours au MBA DMB, Marco Van Heems nous donna la définition du « digital native »:
Expression américaine pour désigner la génération ayant grandi en même temps que le développement d’Internet. On considère généralement que les « digital natives » sont nés entre 1980 et 2000.
Alors la question est la suivante: est-ce que le fait d’être né en 1980 est un argument suffisant pour se sentir légitime dans le monde des startup du social business?
A quelques semaines de la rentrée, notre MBA nous donne l’opportunité de devenir reporter le temps d’une journée en partenariat avec Option StartUp. Je n’hésite plus, je me lance et m’inscris. Mon iPhone et moi nous retrouvons chez Makesense, incubateur de startup sociales. Je vois là une opportunité de plonger dans un monde étrange et attirant qui combine«Economie Sociale et Solidaire» et «Digital» bien loin de mes problématiques habituelles de distribution de matériaux. Leurs nouveaux codes me sont totalement inconnus mais la curiosité m’attire trop pour ne pas me lancer.
Voici le récit de ma découverte.
Tout d’abord, il faut rappeler qu’en France, 14 millions de personnes sont bénévoles avec une évolution de +17% en 2016 par rapport à 2015, selon Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, lors de la chaleureuse soirée des Lauréats «La France s’engage» du 15 novembre 2016 à Paris.
Dans ce contexte, l’entrepreneuriat social est de plus en plus présent au cœur de nos vies.
« L’entrepreneur social est un individu qui met ses qualités entrepreneuriales au service de la résolution d’un problème sociétal à grande échelle. Quel que soit le domaine où il s’engage, l’entrepreneur social se donne comme critère majeur de réussite l’ampleur de son impact sur la société. »
Trouvez plus d’information sur le social business model.
Laissez-moi vous présenter MakeSense, incubateur de startups social
MakeSense, finaliste du Google Impact Challenge en 2015, est un incubateur pour ces entrepreneurs sociaux. Entendez par là, une communauté faite de « Sensmakers » qui aide les entrepreneurs sociaux à relever leurs défis. Elle a été créée par deux Français, rassemble 15 000 personnes, a organisé près de 700 « braquages d’idées » dans 100 villes à travers le monde, et révolutionne l’entrepreneuriat.
Finies les prises de tête tout seul devant son café froid, les startupers ont désormais 15.000 cerveaux prêts à bouillonner gratuitement. Avec MakeSense, les entrepreneurs du social business utilisent les mêmes outils ultra-modernes que les startup de la Sillicon Valley ou d’ailleurs. Son concept rappelle par exemple le réseau Startup Weekend, sponsorisé par Google, qui a déjà rassemblé 45.000 participants, et qui permet en 54 heures, de repartir avec une idée de startup à lancer clef en main. (source Capital)
MakeSense c’est aussi un lieu de rencontre, à travers le SenseSpace à Paris, place de la Bastille. Pour se représenter cet endroit, il faut imaginer un open space avec mezzanine, mobilier en palettes recyclées, frigo connecté pour choisir son plat fait maison que l’on paye sur mobile, déjeuners conviviaux et pour couronner le tout, une salle de méditation.
Me voilà donc plongée le temps d’un reportage au coeur de cette génération de startupers, un peu impressionnée, je suis accueillie avec convivialité. Fière de tweeter la visite des lieux faite aux étudiants, je participe à une journée organisée par Option Startup qui permet la découverte de l’univers des startup pour les Lycéens. Quel plaisir de voir ces jeunes participer si activement pour innover pour un monde meilleur. A la question : « qui ne souhaite pas être filmé ou photographié », tous sont d’accord. Ce n’est pas une question pour cette génération « post-digital native », peut-être futurs startupers eux aussi.
S’en est suivi un hold-up, désormais courant chez MakeSense : on réunit autour d’un entrepreneur social des ingénieurs, cadres du privé, chercheurs d’emplois, étudiants, toute matière grise est bonne à prendre. Le hold-up du jour pour ces étudiants: comment aider la Tablée des chefs, une association qui mobilise les chefs et les professionnels de la cuisine dans la lutte contre l’insécurité alimentaire?
Interview la tablée des chefs
Interview de Marie-Leyla Sassine, chargée de communications et relations externes de la Tablée des chefs, au SenseSpace suite au hold-up du 7 octobre:
Virginie CdeC : « – Marie-Leyla, pouvez-vous nous raconter ce que propose la Tablée des chefs et ce que vous avez vécu aujourd’hui au SenseSpace :
Maire-Leyla S : – Nous sommes une association qui vient du Québec et implantée en France depuis 3 ans. Nous avons 2 axes d’intervention : la récupération alimentaire et l’éducation culinaire. Aujourd’hui nous avons accueilli une classe de terminal qui a réfléchi à notre question qui était de savoir si des collégiens et des lycéens pourraient être intéressés par la mise en place d’ateliers culinaires dans les collèges et les Lycées.
Virginie CdeC : – Ça vous a apporté quelque chose ce brainstorming en mode hold up?
Maire-Leyla S: – C’était hyper intéressant, ils étaient très créatifs, on a eu très chaud dans la salle. Beaucoup d’idées et de bonnes pistes de réflexion pour communiquer mieux et durablement, pour faire adhérer les jeunes à nos ateliers culinaires. A refaire ! »
En témoigne la vidéo, un hold-up, ça fait émerger les idées,et ça aide les associations. Surtout quand un étudiant explique que « la cuisine participative doit être l’avenir de demain » pour aider la Tablée des chefs dans son brainstorming.
Tout y est : bonne humeur, solidarité, bienveillance, business plan et sérieux aussi, l’objectif étant que les startup qui émergent puissent voler de leurs propres ailes après 6 mois d’incubation.
A l’étage de la mezzanine vous trouverez des associations comme (Im)prove, qui mesure l’impact social, environnemental et économique des ONGs, associations, entreprises ou fondations. Ils sont déjà 8 et bien partis pour que ça continue. Curieuse de les rencontrer, j’ai tout simplement été les voir, et ai pu aller boire un café avec la responsable communication. Quelle chance de briser les barrières avec tant de bienveillance. L’étage peut aussi accueillir certaines personnes, ou seniors, pour du coworking dans une ambiance conviviale. Ce lieu peut aussi être loué pour des événements.
Quelques autres lieux emblématiques des startup sociales (source le Laboratoire de l’innovation):
- La Social Factory : incubateur au service du développement des territoires (prix du Google impact challenge)
- The Social Good Lab, lancé par la ville de Paris (accompagné par SNCF)
- Antropia de l’ESSEC qui accompagne une trentaine d’entrepreneurs sociaux/an
L’expérience partagée avec vous aujourd’hui vous aura montré que tout est possible et que les univers ne sont pas cloisonnés. Depuis ce reportage, je suis retournée plusieurs fois sur place pour travailler et profiter des rencontres et de l’état d’esprit créatif et bienveillant d’un tel environnement.
Pour un senior qui a travaillé toute sa carrière dans les matériaux de construction, tout digital native qu’il soit, quelle fraicheur de découvrir les univers parallèles! Je vous encourage à explorer au travers d’une visite ou d’un hold-up. Pourquoi pas vous?
Ce mouvement est en train de prendre de l’ampleur, chacun doit pouvoir y trouver sa place, votre narratrice inclus. Reste à savoir quel est le taux de réussite et l’impact de telles initiatives ? Certains autour de moi continuent à dire: le digital et le lien humain sont antinomiques! ce n’est pas ma conviction. Pour illustrer, voici le cas de Simplon:
J’ai eu la chance de rencontrer Frédéric Bardeau, fondateur de Simplon.co au cours d’une soirée des anciens de NEOMA autour du thème: « Digital et ESS, quels avenirs et possibilités?« . Simplon.co agit pour utiliser le numérique comme levier d’inclusion, s’insertion, d’emploi mais également de mixité, de diversité et d’innovation sociales. Créée par trois jeunes entrepreneurs sociaux, l’école Simplon forme gratuitement des «décrocheurs» à la programmation informatique. Les collectivités et les entreprises adorent. Simplon c’est 45 salariés, 23 écoles en France et 4 à l’étranger. Sur les 82% demandeurs d’emploi au début de la formation, 50% trouvent un contrat à la sortie. Au départ de cette aventure, il s’agissait bien d’ un projet de startup social comme les autres.
Voilà pour mon plongeon dans le monde des startup sociales innovantes, un métier qui a de l’avenir et dont vous entendrez parler à nouveau bientôt j’en suis sûre. Soyez curieux et vous aussi, partagez vos expériences, que vous soyez « digital native » ou non.