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Mon interview avec Lionel REICHARDT

À 40 ans j’ai commencé à m’y intéresser, parce que je ne suis pas de la génération Z ou même Y, ce qui fait que je ne suis pas grandi dedans. J’ai travaillé 15 ans dans l’industrie pharmaceutique et puis je suis parti faire un MBA en marketing digital fondé par un grand Monsieur du web qui s’appelle Vincent Montet, qui a ensuite monté le MBADMB qu’on connaît bien, et auquel je contribue à la fois de façon générique et générale, et de façon particulière sur MBADMB Santé.

Mon rapport au digital n’est pas du tout personnel, je pense que les générations d’aujourd’hui arrivent avec des usages très personnels, moi je suis arrivé en créant PHARMAGEEK, pour des usages : 1) de veille et d’apprentissage, 2) de partage avec une communauté sur un digital santé qui émergeait à l’époque, et puis 3) avec l’envie de contribuer à construire ce digital santé. En tout cas d’y participer à la fois en formant les gens, en accompagnant des entreprises de la santé qui veulent se digitaliser, ou des entreprises dans d’autres secteurs qui veulent entrer en santé. Mon rapport s’est construit comme ça, comme un terrain de jeu d’abord avec PHARMAGEEK, et ensuite avec la création d’une valeur pour moi, et puis j’espère de temps en temps pour mes clients, et pour l’écosystème sur ma contribution sur le digital santé et mon envie de partager.

Un rapport au digital assez pragmatique, très peu d’usage personnel, je regarde Netflix de temps en temps, j’ai un compte Instagram, j’adore la photographie mais je l’adorais avant, et c’est peut-être la partie la plus personnelle de ma présence digitale.

Pourquoi le digital ?

Le digital s’impose dans nos vies, il est là. Il fait partie de nos quotidiens, je ne crois pas qu’il y ait d’un côté la vie, l’économie et le travail, et de l’autre côté le digital.

On l’a bien vu avec le COVID ces 3 dernières années, notre monde est hybride désormais. Il est à la fois dans l’analogique et dans le digital. Le digital s’est imposé naturellement, je dis souvent que PHARMAGEEK c’est mon double numérique, ça me permet de dissocier ce que je suis en tant qu’individu, ma vie tout à fait normale par ailleurs. Et puis ce que je vis en tant que blogueur, c’est-à-dire la possibilité de rencontrer beaucoup de monde, de voyager et d’échanger, d’intervenir sur un certain nombre de sujets.

Je crois qu’il faut aussi prendre beaucoup de recul par rapport à ça, j’ai parmi mes nombreux projets de livres, deux livres en cours ; un sur la place du digital dans la pandémie et un autre qui s’appelle « les voleurs de vie ». Les voleurs de vie justement c’était pour montrer comment le digital au-delà de l’économie de l’attention, mais aussi à travers son intérêt pour nos données, son impact sur l’environnement et sur l’écologie, les ressources, et un certain nombre d’autres choses. Comment le digital à contribuer aussi à voler nos vies et qu’il fallait être très vigilant de le garder à une place raisonnable. Il aide lorsqu’on achète des choses, il aide pour travailler à distance, il aide à améliorer le parcours de soins, mais le digital n’est pas une fin en soi. C’est juste un moyen qui doit contribuer à améliorer l’accès à quelque chose, à améliorer la réalisation de quelque chose. 

Je crois beaucoup plus à l’augmentation qu’au remplacement, notamment dans la santé. On se pose souvent la question, si demain on est soigné par une intelligence artificielle, si les médecins sont remplacés par des outils. Non je ne crois pas, et en tout cas ce n’est pas le monde que je veux, je suis peut-être très ancienne génération. Je pense que le digital doit nous rendre plus fort, il doit simplifier des tâches éventuellement qu’on n’a pas envie de faire, il doit aussi nous permettre de nous consacrer à des choses à valeur ajoutée et où faire gagner du temps où faire gagner de l’efficience et de la précision.

Le digital c’est quelque chose qui est là, avec lequel on doit composer, mais qui est très nouveau. Je le rappelle toujours dans mes formations, internet a été créé il y a 30 ans. On a très peu de générations qui ont connu des bouleversements technologiques aussi importants sur un temps aussi court, le train par exemple s’est imposé sur les 3 générations, pour passer de la vapeur à électrique à d’autres technologies, le téléphone a mis aussi énormément de temps.

C’est vrai qu’avec le digital on voit des pénétrations dans nos vies en quelques mois, quelques semaines parfois, avec des milliards d’utilisateurs très rapidement. Ça bouleverse, et on voit bien qu’on a beaucoup de mal à prendre du recul par rapport à certains outils digitaux. C’est ça qu’il faut qu’on fasse, essayer de laisser le digital la place qu’il doit avoir, c’est-à-dire quelque chose qui nous apporte un plus et qui ne nous retire pas de la vie.

Selon toi comment le digital peut améliorer notre système de santé ?

La question est difficile, le système de santé est très lié à la culture et l’économie d’un pays, dans chaque pays on va avoir des impacts différents. En Afrique l’amélioration du système de santé par les outils digitaux, notamment des outils de télésurveillance, de mobilité, peuvent être très impactant parce qu’il n’y a pas de système de santé.

Si on fait le constat sur notre système de santé aujourd’hui, il y a un gros problème des ressources humaines, encore une fois si on peut aider à réduire le temps administratif d’un médecin, lui simplifier les tâches sur lesquelles sa valeur ajoutée n’est pas forcément évidente, si on peut lui faire gagner du temps dans l’accès à l’information, dans l’accès à un autre médecin, dans l’accès aux patients, et réciproquement. Si on peut aider le patient à avoir accès au système de santé, à travers la télémédecine, à travers les soins virtuels à travers un certain nombre de choses.

Je pense que le digital doit alléger la tâche de l’humain, et on l’a bien vu pendant le COVID à un moment donné quand on retournait un corps en réanimation, il faut 6 personnes autour qui soulèvent et retournent. On peut mettre autant de digital qu’on veut, ce ne sont pas les petits smartphones qui vont aller retourner la personne. Il faut qu’on ait de l’humain. L’humain doit être au cœur, à la fois l’humain patient, l’humain soignant et l’humain aidant.

Je reviens à cette idée d’augmentation, je pense que le digital doit être là pour augmenter le patient, augmenter le soignant, augmenter l’aidant. Lui simplifier la vie, lui apporter l’information plus rapidement comme Docteur Google qui est très sollicité, on a aussi d’autres sources d’information comme Santé.fr du ministère qui peut l’aider. Après il faut-il que tout ça soit validé, et on voit bien aujourd’hui qu’on manque de validation clinique sur un certain nombre de ces solutions de E-santé, qu’on a encore beaucoup de digital Washing dans la santé, avec des allégations et des affirmations qui ne sont pas toujours à la hauteur des promesses qui sont annoncées.

Je crois que la vision dans laquelle on sera soigné demain, effectivement elle sera beaucoup basée sur la donnée avec un parcours de soins qui sera beaucoup plus clair pour tout le monde et beaucoup plus rapide, facile, accessible. Puis il faut qu’on soit vigilant à ne pas créer plus d’inégalités qu’il n’y en a déjà, avec un digital qui serait disponible que pour les riches ou les plus instruits, et puis à côté toute une population qui est déjà mise à mal et qui sera encore plus.

Puis je ne parle même pas encore d’éthique là aussi, sur l’intelligence artificielle. Comment les décisions vont être prises, quand elles sont prises assister avec une intelligence artificielle. Comment on s’assure que c’est dans l’intérêt du patient et pas forcément dans l’intérêt du payeur ou dans l’intérêt d’un système, là aussi beaucoup d’enjeux à faire.

Les enjeux dans les prochaines années ?

Il y a de nombreux enjeux… difficile de tous les énumérer.

Nous avons la question de la validation de ces dispositifs de santé digitale, comment est-ce qu’on s’assure à la fois sa validité clinique et médicale ? la confiance qui va l’accompagner pour développer les usages, la prise en charge financière qui n’est pas négligeable, le système de remboursement va être l’un des grands enjeux qu’on va avoir. Puis le fait de former et d’accompagner des gens aussi bien, les soignants que les patients sur l’usage de ces outils-là.

Du coup, à mon avis, l’enjeu principal est le développement des usages pour les années à venir, parce que de la E- santé on en a eu des milliards de $ qui ont été dépensés depuis des années, aussi bien en France que dans le monde. Plus de 100 milliards de levés sur les 10 dernières années dans le monde. Pourtant la vie des soignants et la vie des patients n’a pas encore beaucoup changée, car les usages ne se sont pas passés et les grands enjeux actuellement ça va être de développer ces usages.

Où tu te vois dans 10 ans ?

Holà… Je crois qu’il y a 10 ans je ne me voyais pas là où je suis, et je ne suis pas sûr que j’aurais réussi. Mais visant à me projeter sur ce que je fais actuellement, j’essaye au jour le jour de faire des choses le mieux possible. J’espère travailler sur des sujets qui contribueront à faire avancer les choses. Aujourd’hui je m’intéresse beaucoup à l’environnement et à la prévention.

La place des sciences humaines dans la esanté, les changements de comportements, l’empowerment du patient sont des thématiques qui me passionnent.

Je ne me projette pas, mais j’espère continuer à apporter quelque chose à la communauté, et puis surtout à faire des choses qui me plaisent avec des gens que j’apprécie, c’est ma chance aujourd’hui de pouvoir travailler avec des gens que j’aime bien, et j’espère que je continuerai pour les 10 ans à venir.

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