L’étude des acteurs des services de robo-advisory permet de comprendre la façon dont leur offre amène une rupture sur le marché de la gestion de patrimoine. En quoi consiste cette innovation et quelle rupture apporte-t-elle sur le marché de la gestion de patrimoine ?
L’automatisation du conseil financier a en effet émergé dans les secteurs de l’assurance, de la gestion d’actifs et de la gestion des titres. De nouveaux acteurs adoptent ces technologies et proposent des services de conseils en investissement à destination des clients finaux en limitant l’intervention humaine. Ces services sont proposés à des tarifs significativement réduits en comparaison de ceux proposés par les acteurs traditionnels du marché de l’épargne, si bien que l’on peut parler de démocratisation de la gestion de patrimoine. Les acteurs engendrent une désintermédiation de certains métiers bancaires, et la façon dont les acteurs traditionnels de la gestion de patrimoine réagissent à l’arrivée de ces nouveaux entrants dans leur marché.

En février 2016, une étude nommée From Trust To Loyalty : What Investors Want et menée auprès des membres du CFA Institute, l’association mondiale des professionnels de l’investissement, révélait que 70% d’entre eux estiment que l’émergence d’outils de conseils financiers automatisés ou robo-advisors aura un impact positif sur le grand public en permettant « une réduction des coûts, un meilleur accès au conseil et à une plus grande variété de produits ». Des nouveaux acteurs de la FinTech, les startups de l’industrie financière, proposent en effet grâce à l’utilisation d’algorithmes, des services de conseils financiers automatisés à destination du grand public. Ces acteurs sont appelés robo-advisors ou « conseillers- robots » et fournissent des services d’investissements en ligne, sur des applications web ou mobile ergonomiques. Ils constituent un type de conseiller en gestion de patrimoine particulier puisque leur activité de conseil et de gestion de portefeuilles est assurée de manière totalement automatisée ou presque, et limite la nécessité d’une intervention humaine. L’automatisation du conseil financier n’est pas sans conséquence pour les acteurs traditionnels de la gestion de patrimoine. Les grandes banques privées, les Conseillers en Gestion de Patrimoine (CGP) ou même les banques de détail classiques risquent de voir leurs clients migrer vers ces nouvelles solutions pour gérer leur épargne. Une étude du cabinet de conseil en stratégie McKinsey prévoyait ainsi en octobre 2015 une forte baisse de rentabilité pour les banques de détail dans les années à venir, « les FinTech menaçant jusqu’à 60% de [leurs] revenus ».
Certes, ces acteurs traditionnels ont déjà emprunté le chemin de la digitalisation, en lançant notamment des activités de banques en ligne et en numérisant leurs processus pour faciliter les parcours de leurs clients. Il semble cependant que ces initiatives ne soient pas suffisantes face à l’expérience client proposée par les robo-advisors. Selon les membres du CFA Institute, les robo-advsisors sont, parmi l’ensemble des différentes FinTechs, celles qui auront l’impact le plus significatif à
court terme (1 an) et à long terme (5 ans) sur l’industrie des services financiers. Dès lors, il s’agit de s’interroger sur l’origine de cet impact et sur ses différentes formes : dans quelle mesure les robo-advisors bouleversent-ils le marché de la gestion de patrimoine ?
L’automatisation du conseil financier est à l’œuvre dans le secteur bancaire, le secteur de l’assurance et celui de la gestion des titres. Des outils automatisés à destination du client final ou des conseillers émergent pour obtenir des conseils sur l’achat et la vente de produits ou d’instruments financiers. Ces processus d’achat ou de vente se font dès lors avec une intervention humaine limitée. Il existe des outils totalement automatisés, notamment dans le secteur de la gestion des titres. Ces outils apportent des conseils sur les transactions d’instruments financiers ou dans la gestion d’assurance dommages. Des modèles hybrides partiellement automatisés sont également apparus dans ces trois secteurs (bancaire, assurance, et gestion des titres), notamment sur des produits bancaires comme les crédits immobiliers ou les comptes épargnes. Les clients finaux utilisent alors ces outils automatisés pour obtenir des conseils basiques sur ces produits. Il est ensuite demandé aux clients de fournir leurs contacts personnels afin que l’institution financière prenne le relais pour arranger un entretien avec un conseiller humain. Malgré l’existence de ces modèles hybrides, le dénominateur commun de l’usage de ces outils de conseil financier automatisés est la limitation de l’intervention humaine. Celle-ci est remplacée par des algorithmes qui peuvent être utilisés par des conseillers humains ou qui s’adressent
directement au client final. (Fig1)

La technologie derrière l’automatisation du conseil financier est un ensemble d’algorithmes quantitatifs. Le conseil fourni par ces algorithmes est dépendant de deux éléments clés :
- Les informations personnelles fournies par le client qui renseignent
généralement ses informations en ligne sous la forme de réponses à un
questionnaire ;
- La logique de l’algorithme, qui choisit les produits ou services qui devraient être
recommandés au client en fonction des caractéristiques personnelles qu’il a
fournies.
Ces algorithmes sont souvent présentés sous la forme d’un arbre de décisions où le client répond à une séquence de questions préalables à partir desquelles vont être générées des recommandations spécifiques basées sur ses réponses. Les informations fournies par le client peuvent prendre la forme de données objectives telles que l’âge, l’activité professionnelle, les revenus mensuels, le nombre d’enfants, etc. Plus fréquemment, le client est amené à renseigner des données plus subjectives telles que son objectif d’investissement, sa condition financière, sa tolérance au risque, son niveau de connaissance et d’expertise financière, etc. Le mode de fonctionnement de ces algorithmes peut être décomposé en plusieurs étapes. Un questionnaire permet d’abord d’identifier le profil de l’utilisateur en termes d’objectif de performance, de tolérance au risque ou de dynamique de gestion. Ensuite, l’algorithme génère une allocation d’actifs personnalisée en fonction des critères de l’utilisateur. Cette allocation individualisée tient compte du profil de l’utilisateur, mais aussi des conditions de marché. L’algorithme sélectionne ainsi au sein de chaque classe d’actifs le fonds ou l’ETF (Exchange Trade Fund) ayant les meilleures caractéristiques par rapport aux conditions du marché. Certains algorithmes sont dotés de la capacité d’envoyer des alertes aux utilisateurs en cas de changements de cycle de marché, ou encore d’envoyer des reportings pour informer le client des performances réalisées.