La parole à Frédéric Schreiner

La parole à Frédéric Schreiner 

 

Je vous propose de plonger avec moi à la découverte d’un métier à la fois très technique mais aussi au plus proche de l’être humain. Un domaine où le digital et le médical se sont alliés pour prodiguer un service de plus en plus précis, pointu et performant, où le numérique est au service de notre cœur.

 

Bonjour Frédéric est-ce que tu pourrais te présenter ?

Je m’appelle Frédéric Schreiner. Je travaille pour Biosense Webster, une filiale de Johnson & Johnson.

Je suis Advanced clinical support specialist, spécialiste de l’application clinique d’un système de cartographie du cœur. Cette technologie a pour but de traiter les troubles du rythme cardiaque : les tachycardies.

Quel a été ton parcours d’études et ton parcours professionnel ?

Mes études :

Pour l’Europe j’ai un parcours d’étude atypique. Je suis originaire de Tahiti, en Polynésie française où j’ai étudié jusqu’à mes 18 ans. Après avoir obtenu mon Bac scientifique, je suis parti en France pour poursuivre mes études supérieures. J’ai fait deux années de classe préparatoires à Paris au Lycée Saint-Louis. Ensuite j’ai fait l’école des Mines à Douai en France. Je suis ingénieur en environnement et risque industriel. J’ai parallèlement suivi une filière commerciale, le but étant, par la suite, de pouvoir m’orienter vers un métier hybride, qui soit à la fois technique et commercial.

Mon parcours professionnel :

Aujourd’hui le fait de me retrouver dans un milieu médical est dû à un concours de circonstances.  Mon parcours professionnel a débuté dans un bureau d’ingénieur pour lequel j’étais en charge de la rédaction d’offres technico-commerciales. Puis j’ai cherché à changer pour un poste plus technique qui alliait une dimension plus sociale. C’est mon profil à la fois technique et commercial ainsi que mon attrait poussé pour le domaine qui m’ont permis de débuter dans cet emploi.  Je fais actuellement partie d’une équipe de ventes qui assure le support technique de nos produits. Je suis spécialiste de l’application clinique de notre système de cartographie, du matériel associé et leurs applications.

En d’autres termes, je vais aider les médecins pendant leurs interventions, en paramétrant notre système de cartographie en temps réel. Je leur apporte mon expertise et ma connaissance de nos produits et de notre système de navigation. Une autre partie de mon travail consiste à assurer des cycles de formation. Je suis spécialiste de l’application clinique de notre système de cartographie, du matériel associé et leurs applications.

La formation pour ce poste se fait en continue par l’entreprise et dure environ 1 ans, même si on en apprend encore tous les jours ! Elle est faite d’un gros socle théorique ainsi que le suivi d’un « field trainer » qui s’assure de notre niveau de compétence. Mais c’est aussi beaucoup d’apprentissage par la pratique.

Il faut compter 1 an pour savoir tout faire et 2 ans pour savoir tout BIEN faire.

Aujourd’hui, cela fait quatre ans que je travaille pour cette entreprise. Je suis maintenant passé en position de sénior et réfèrent pour les procédures complexes. Je suis responsable pour le grand hôpital universitaire de la région avec lequel nous travaillons beaucoup et où il y a de nombreux cas complexes sont traités. Je suis maintenant à mon tour en charge de former les moins expérimentés.

 

Qu’est-ce qui t’a attiré dans ce métier ?

 

Ce que je trouve vraiment incroyable pour un ingénieur, plus généralement destiné à travailler sur des micros parties d’un projet où le produit final peut-être très lointain, là c’est un domaine dans lequel tous les jours j’ai l’impression d’aider quelqu’un, en contribuant au traitement d’un malade. L’ajout ici est ce côté extrêmement concret. Tous les jours, un médecin me dit merci, c’est donc un métier très gratifiant.  On allie à la fois le côté humain à l’hyper technicité, avec de l’électronique et des ordinateurs de pointe.

 

A quoi ressemble une journée type dans ton métier ?

 

A chaque fois qu’un hôpital a une procédure qui nécessite notre système de cartographie, une personne de notre entreprise se déplace pour assurer le support clinique. Ces déplacements se font de manière quotidienne.

L’hôpital nous envoie en amont son planning d’interventions pour que nos équipes soient prêtes et disponibles en avance.

Tous les jours je suis un acteur des procédures médicales où je travaille en binôme avec un médecin. En moyenne, 80% de mon temps est consacré aux interventions et les autres 20% sont consacrés à l’administratif qui gravite autour.

L’intervention consiste en deux phases. La première phase est la partie diagnostic. Cela consiste à cartographier le cœur du patient depuis l’intérieur avec nos cathéters.

Une fois que l’on a compris le type d’arythmie dont il s’agit, ainsi que son circuit dans le cœur, on entame la deuxième phase. Durant cette phase on traite cette arythmie en allant faire des petites brulures avec de l’énergie par radiofréquences (thermoablation) le but étant de cautériser les cellules anormales qui sont source de l’arythmie.

 

A tes yeux, quelle importance à le digital dans le domaine médical ?

 

Dans mon domaine d’expertise, cela a rendu possible des interventions qui sans le digital n’étaient pas possible auparavant.

Un autre aspect important est l’optimisation des temps de procédure. En effet, aujourd’hui ces procédures sont deux à trois fois plus rapides. Le digital permet également d’apporter beaucoup de sécurité et de ce fait d’augmenter l’assurance des médecins lors des interventions sur lesquels nous collaborons.

Pour les interventions dites conventionnelles, pour savoir où se trouvaient les sondes dans le cœur on devait utiliser de la fluoroscopie, c’est-à-dire des rayons X, qui sont des rayons ionisants. Aujourd’hui, grâce à notre système de cartographie on arrive à connaître la position des sondes sans l’utilisation de rayons ionisants. Cette cartographie du cœur, permet de protéger les patients, le médecin ainsi que tout le personnel hospitalier de ces rayons. Dans ce domaine il s’agit d’une grande avancée technologique, qui n’était pas possible il y a quelques décennies.

 

Quels sont les challenges que tu rencontres aujourd’hui avec cette technologie ?

 

Les challenges il y en a beaucoup et ils sont de natures différentes.

On rencontre des challenges humains. Face à une nouvelle technologie, le changement dans des procédures déjà bien établies peut-être compliqué. L’être humain n’a pas toujours envie de modifier ses habitudes on ajoute à cela, le temps d’adaptions aux nouvelles techniques. Les challenges sont également économiques car l’équipement en nouvelle technologie coûte un certain prix. Tout le processus d’installation est laborieux, entre la phase d’approbation et d’installation un certain temps peut s’écouler.

 

A ton avis, quel est le futur de cette technologie et ses développements ?

 

D’un point de vue technique, il s’agit d’une technologie en perpétuel développement. Johnson & Johnson est une compagnie qui investit beaucoup dans la R&D. La société est propriétaire de ce système et du matériel depuis plus d’une vingtaine d’années.

Ainsi, chaque année on observe, la sortie sur le marché d’un nouveau produit. Il peut s’agir d’un nouveau software optimisant le système déjà existant, d’un nouveau matériel/sonde/cathéter avec des fonctionnalités supplémentaires, le but étant de toujours mieux comprendre et traiter les arythmies.

Selon moi cette technologie va continuer à se développer. On va pouvoir observer l’amélioration de ce système, notamment au travers d’ajouts de fonctionnalités, qui permettront d’optimiser et d’augmenter la précision du diagnostic.

Le futur de cette technologie va également reposer dans l’optimisation du traitement en lui-même, c’est-à-dire la manière dont on délivrera l’énergie pour traiter les cellules malades.

 

Actuellement quels sont tes défis personnels ?

 

Mes défis personnels sont fortement liés à l’avenir et au développement de l’entreprise.

La transmission de mes connaissances va être l’un des points cruciaux dans le futur. Cela va passer principalement par l’optimisation de l’appropriation du développement de cette nouvelle technologie. Ce savoir serra transmis, par la suite, aux hôpitaux qui pourront à terme, être en mesure de les implémenter dans leur écosystème.

Dans ce milieu professionnel, chaque situation a sa problématique, il n’existe donc pas de solution clef en main applicable à toutes les situations. Il s’agit d’un vrai travail d’artisan. À mon sens c’est sur ce point que la problématique résidera et c’est ici que le digital jouera un rôle majeur.

 

Selon toi, dans le futur, quelle sera la place du digital dans le domaine médical ?

 

Le digital interviendra sur de multiples aspects de milieu de la santé. Selon moi, ce que l’on nomme interopérabilité va se développer. Il s’agit de la communication entre systèmes afin de mettre en commun les résultats des diffèrent examens. L’amélioration de ce processus permettra d’optimiser le diagnostic, ce qui impactera positivement le reste de chaine de traitement.  Si l’on prend un exemple plus concret, il s’agira de connecter les différents services de l’hôpital. Ainsi, l’optimisation du flux d’informations propres à un patient à son arrivée en salle d’intervention, aboutira à une prise en charge plus efficace du malade ainsi qu’une amélioration du processus de soins.

Le digital interviendra également, dans la mutualisation de connaissances. Du côté recherche, on développe des outils afin d’aider les hôpitaux à mieux communiquer entre eux sur des cas patients et sur certaines procédures. L’optimisation de cette communication permettra de faire progresser la recherche, mais aussi faciliter et accélérer la mise en commun des connaissances. Le digital fait indéniablement avancer la recherche scientifique.

 

Qu’aimerais tu voir apparaitre dans le futur de vos systèmes ?

 

Avec la montée des puissances de calcul et celle de l’intelligence artificielle, je suis assez curieux de voir comment l’IA, appliquée dans un système comme le nôtre pourra permettre d’optimiser le diagnostic et de faciliter notre tâche et celle des médecins.

 

As-tu des conseils pour quelqu’un qui souhaiterait s’orienter vers le même métier ?

 

C’est un métier riche et passionnant dans lequel il faut constamment s’impliquer, donc mon conseil est de bien s’informer. Allez sur internet, lisez des articles sur le sujet et si le domaine vous intéresse n’hésitez pas à nous contacter pour voir s’il est possible d’assister à une intervention et découvrir comment les choses se passent en réalité.

Merci beaucoup Frédéric pour ce moment passé ensemble.

https://www.linkedin.com/in/frederic-schreiner-05588494/

Si vous souhaitez approfondir le sujet du digital et son application dans la santé, je vous invite à consulter l’article de Karima Amadi sur « L’IA au service des maladies mentales »

https://blog.mbadmb.com/intelligence-artificielle-maladies-mentales/