De la monnaie virtuelle au monde des blockchains #1

Le sujet Blockchain, il y a encore peu de temps réservé à quelques initiés souvent considérés comme over-disruptifs, est aujourd’hui l’objet de toutes les attentions. Éphémère feu-follet, danseuse des réseaux sociaux ou avancée majeure dans l’univers transactionnel telle est la question que l’on peut se poser.

 

 

 

Une série de 4 « billets » va nous permettre de parler au pluriel des Blockchains

 

#1 Des origines teintées de mystère pour comprendre comment un mix techno-philosophique bouleverse un acte originelle de l’activité humaine, la transaction,

#2 Registre, Puissance de calcul, Minage, Cryptographie : qu’est ce que la Blockchain, ses principaux atouts mais aussi de gros défis à relever,

#3  Privée, publique, ouverte, fermée, quelles Blockchains apparaissent aujourd’hui et dessinent les premières esquisses d’un phénomène de standardisation,

#4 Focus sur un secteur que la Blockchain peut bouleverser : l’énergie.

 

 

 

Des origines teintées de mystère pour comprendre comment un mix techno-philosophique bouleverse un acte originelle de l’activité humaine, la transaction.

 

 

Nous sommes au coeur des années 80, la technologie informatique de l’époque repose essentiellement sur les progrès de la miniaturisation des micro-processeurs. IBM sortira son premier PC (Personnal Computer) très vite adopté par les entreprises.  Cette décennie verra aussi le développement de certaines technologies courantes de nos jours : écran LCD, Smart Watch, Tablette Tactile, Mac…intosh,

L’ essor de l’informatique correspond également au développement des langages de programmation et des systèmes d’exploitation. A titre d’exemple on peut citer le système MS/DOS et le langage BASIC développé par une start-up (Microsoft) retenus par IBM pour ces PC.

Les années 80 virent aussi l’aboutissement de travaux entamés une vingtaine d’années auparavant, à  savoir la mise en oeuvre des fondements technologiques et protocolaires de ce qu’on appelle aujourd’hui Internet. Ainsi, la NSF (National Science Foundation) qui dépend de l’administration américaine, mettra en place cinq centres informatiques surpuissants, auxquels les utilisateurs pouvaient se connecter, quel que soit le lieu où ils se trouvaient aux USA.

Enfin cette décennie est aussi remarquable de puissants mouvements d’émancipation collectifs, la chute du mur de Berlin (1989) qui illustre la fin du bloc soviétique et la révolte populaire contre ses méthodes liberticides, la révolte de la place Tian’anmen en Chine (1989), qui vit de nombreux jeunes chinois défier l’autorité en place pour demander des réformes politiques et démocratiques et dénonçant la corruption. On peut citer également la fin de la dictature en Roumanie (1989), mais aussi des conflits (Iran/Irak et Syrie) dont la résonance nous porte jusqu’à nos jours dans l’expression de la liberté opprimée. Ces événements traduisent un refus de la centralisation outrancière du pouvoir souvent accompagné d’un manque de confiance dans les tiers dits « de confiance ». Ils expriment aussi le souhait de voir chaque citoyen prendre sa place de façon autonome dans une organisation collective et à certains égards collaborative. De telles aspiration sociétales trouvent aujourd’hui un écho dans le modèle développé par la Blockchain.

Sur le volet technologique, comme toutes les périodes, les années 80 portent leur lot de prédictions sur ce qui se déroulera à l’avenir. Voiture sans chauffeur, ordinateurs fabriqués à partir de bactéries, appareils électroménager obéissant à la voix de leur propriétaire, l’automatisation comme source de bien-être pour l’homme sont autant de sujets prospectifs abordés il y a plus de trente ans déjà dans une vision positive de l’avenir. Mais à l’opposée d’autres voix s’élevaient et ciblaient le progrès technologique comme potentiellement liberticide et dangereux pour l’équilibre de nos sociétés développées.

Progrès technologique, vent de liberté pour certains, esprit libertaire pour d’autres, voilà le terreau quasi-invisible au sein duquel la graine Blockchain va très doucement germer, cultivée par de nombreux jardiniers éparpillés aux 4 coins du monde.

L’ éclosion est encore lointaine, mais ces jardiniers de l’ ombre que l’on peut aussi appeler crypto-anarchistes ou encore cypherpunk vont poser par leur travaux disparates autour des transactions et de la monnaie les premières bases de la blockchain.

Ces groupes de hackeurs de très bon niveau vont peu à peu se rassembler pour travailler sur un modèle de monnaie virtuelle. Leur conviction est que le monde numérisé à venir sera en capacité d’espionner tout le monde, tout le temps. Bill Gates lui même confirmera cette défiance sécuritaire en déclarant « un ordinateur en sécurité est un ordinateur éteint, et encore… »

Leur mode de pensée est un renversement contre intuitif en opposition de la pensée dominante autour de la confiance en nos institutions. Ce qui engendre en leur sein l’émergence d’un courant de pensée philosophique et anarchiste au sens de :

« minorer le rôle de l’Etat, des institutions, des tiers dits « de confiance », et fonctionner grâce à la technologie en mode communautaire »

Bitcoin est une blockchain monétaire

Un mouvement est en marche et rien ne saura l’arrêter même si il est invisible de 99,9 % de la population. Entre 1977 et 2008 (année de naissance officielle du BitCoin), ces divers contributeurs auront crée, étudié et documenté :

By Helperdz (Own work) [CC BY-SA 4.0 via Wikimedia Commons

 

 

 

1977 : Description du chiffrement RSA qui utilise une clé publique pour chiffrer et d’une clé privée,
1979 : Invention du mécanisme de compression par l’arbre de Merkle, qui est utilisé pour stocker et vérifier un grand volume de données efficacement et de manière sécurisée,
1990 : Invention de DigiCash une monnaie électronique (centralisée et propriétaire) basée sur des protocoles cryptographiques.
1992 : Arrivée de l’algorithme ECDSA (Elliptic curve digital signature algorithm) qui utilise des clés plus courtes et permet des opérations de signature et de chiffrement plus rapides qu’RSA.
1994 : Emergence de l’idée de « smart contract » , protocole de transaction informatique qui exécute les termes d’un contrat.
1996 : la NSA publie un rapport intitulé « Comment produire de la monnaie : la cryptographie du cash électronique anonyme ».
1997 : Invention de Hashcash, un système de preuve de travail
1999 : Invention, avec Napster de la technologie pair-a-pair, ou peer-to-peer (P2P) technology.
2000 : développement de Gnutella, première plateforme  de transfert de fichiers P2P complètement distribuée.
2002 : Création par la NSA du protocole cryptographique HASH256 qui est devenu le standard utilisé par le Bitcoin.
De 1998 à 2005 : le projet BitGold, propose une monnaie numérique décentralisée basée sur des chaînes infalsifiables de preuves de travail et utilisant beaucoup d’éléments qu’on retrouvera dans Bitcoin : horodatage, signatures numériques, clés publiques…  Le système se révèle cependant trop vulnérable aux attaques.

 

Trente années de travaux menés avec un seul et unique but, établir des échanges de données authentifiées et inviolables de manière décentralisée.

 

Le Bitcoin est une blockchain monétaire

En 2008, sous le pseudonyme de Satoshi Nakamoto, le nom de domaine bitcoin.org est réservé.

 

Le début de l’aventure Blockchain est proche, toutes les briques technologiques sont là, durant cette même année 2008, la monnaie virtuelle Bitcoin est officiellement créée et le terme Blockchain est aussi prononcé pour la toute première fois par un programmateur nommé Hal Finney dans un message adressé à Satoshi Nakamoto.

Au début de l’année suivante le premier « block » est créé et la première transaction en Bitcoin (BT) est réalisée entre les 2 hommes pour un montant de 10 BT au sein du « Block 170« , la Blockchain est née, nous sommes en 2009.

Le halo de mystère qui a concouru à l’émergence de cette technologie anarcho-disruptive est encore de mise malgré la forte médiatisation du sujet depuis ces 2/3 dernières années. En effet derrière le pseudonyme de Satoshi Nakamoto, quasi légendaire pour la communauté des cypherpunks, se cache un personnage ou un groupe inconnu à ce jour malgré les nombreuses tentatives d’identification à chaque fois démenties depuis plus de 5 ans maintenant.

Après avoir joué les explorateurs pour décoder les origines dans ce premier volet consacré à la Blockchain, il nous faudra faire preuve d’encore plus de curiosité en répondant aux questions suivantes dans les prochains numéros :

Qu’est ce que la Blockchain ?, comment cela fonctionne t-il ? est-ce la solution universelle parfois décrite ?

Toutes les réponses à ces questions et bien plus encore,  rendez vous le 28 décembre prochain, entre la bûche de Noel et les cotillons de la nouvelle année pour aborder le deuxième volet consacré à la Blockchain .

 

 

En attendant voici quelques éléments de compréhension.